B. comme Fontaine, un quartet vertigineux (© Hervé Suhubiette)

Julie 2 D, D’âmes et d’Hommes (© Claude Fèvre)

3 septembre 2016 – Julie 2 D, D’âmes et d’Hommes

avec Julie Wull­schle­ger au chant, David Mei­gnan (pia­no, cajon et gui­tare) Domi­nique Robert (accor­déon, basse)

Salle des Fêtes – Cuq (Lot & Garonne)

Dans ce pays de l’agenais, on ne s’en cache pas, on aime et on défend la Chan­son… plu­tôt bien et par­fois mieux qu’ailleurs. Si l’on pense à Astaf­fort, à Voix du Sud, si l’on pense aus­si au géné­reux duo Soham, au gui­ta­riste Chris­tian Laborde et à sa déli­cieuse com­pagne Dali­la Azzouz, si l’on rap­pelle l’action de Mau­rice Leul­lieux avec son Poè­mé­lo­dies… si l’on s’en va vers les Musi­cales de Fla­ma­rens en leur châ­teau. Dans ce coin de France, on croise inévi­ta­ble­ment David Mei­gnan – quand on est fils d’André Mai­ral, on n’échappe pas au spec­tacle vivant ! – et sa com­plice Karin, dite La Rou­qui­qui­nante. Ces deux là se sont amou­ra­chés l’un de l’autre et cet amour là dif­fuse la joie de chan­ter : la grande, la pal­pi­tante et la popu­laire Chan­son, celle de Fer­rat, Piaf, Nou­ga­ro, Brel…et de tant d’autres. Alors, bien enten­du que vou­lez-vous que fît la fille de Karin, pré­nom­mée Julie ? Elle chante… et c’est émou­vant de l’entendre dire que c’est en scène qu’elle se sent véri­ta­ble­ment vivre. Pour le reste, tout est si ten­du, dif­fi­cile… On sait tout cela.

Aujourd’hui nous assis­tons à une créa­tion qui s’en va dès aujourd’hui à Ber­lin où se déroule chaque année en sep­tembre des jour­nées consa­crées à Bras­sens. Là-bas une com­mu­nau­té fran­co­phone main­tient le goût de notre Chan­son, depuis que l’occupation des Alliés s’est par­ta­gé Ber­lin après guerre …

Donc voi­ci Julie entou­rée des deux D, à savoir David Mei­gnan et Domi­nique Robert. Ces deux là qui s’acoquinent aus­si quand Karin La Rou­qui­qui­nante chante, ont sui­vi, por­té, encou­ra­gé le dé-tri­co­tage de la jeune, fou­gueuse et dévas­ta­trice Julie. Car si chan­ter les autres, c’est dans ses gênes, pas ques­tion de se sou­mettre, d’imiter ser­vi­le­ment ni les inter­prètes ori­gi­naux, encore moins sa mère. Alors elle s’empare des récentes comme des plus anciennes et vous fait sa rébel­lion ! C’est déca­pant et tout bon­ne­ment réjouis­sant, jamais atten­du ! Elle casse les rythmes, scandent entre raga reg­gae, visitent les mélo­dies pour faire siennes les chan­sons des autres et on aime furieu­se­ment cette audace, cette inso­lence de fille d’aujourd’hui.

Le concert débute avec l’enchaînement savou­reux d’une chan­son de Nina Simone et Le ciné­ma de Claude Nou­ga­ro. C’est Au sui­vant, qui vient ensuite… La troi­sième, Mou­rir pour des idées dis­til­le­ra très vite ce que Julie aime dans la chan­son : expri­mer cette part de soi qui étouffe par­fois et qui, là, en scène peut s’exprimer au grand jour. On espère que Julie va trou­ver sa voie dans cette jungle de consi­dé­ra­tions éco­no­miques autant qu’artistiques qui la guettent. On espère que vous pour­rez écou­ter un jour cette voix, avec une dic­tion exem­plaire- sou­li­gnons ce détail !- qui s’empare de chan­sons, émou­vantes comme La petite can­tate de Bar­ba­ra accom­pa­gnée seule­ment de la basse –une jolie trou­vaille ! – par­fois déchi­rantes comme Te sou­viens-tu de Mano Solo, Pauvre Mar­tin ou La com­plainte des filles de joie de Bras­sens,  par­fois faus­se­ment comiques comme Fais moi mal John­ny de Boris Vian ou plus encore Qu’est ce qu’ils sont cons de Mat­thieu Côte… La remer­cie­ra-t-on assez de chan­ter ce jeune auteur par­ti sans avoir atteint ses trente ans ? Il en avait tant à dire !

Elle joue aus­si des chan­sons actuelles ou non avec tou­jours un effet de sur­prise à la clef, les deux D, David et Domi­nique, y met­tant leur grain de sel avec effi­ca­ci­té. On cite­ra Le vent l’emportera de Noir Désir, C’est comme ça qu’on s’aime de Stro­mae dont les arran­ge­ments viennent se mêler à Car­men… « Prends garde à toi » !

Quand on vous dira que le concert s’achève sur C’est peut-être d’Allain Leprest vous aurez com­pris que la pas­sion de Julie n’a pas de fron­tière… comme la Chan­son, cette chan­son qui nous parle D’âmes et d’Hommes, dans leur chair, leur sang et leur goût de vivre et d’aimer.