Hélène Piris, album Tour du monde (© Xavier Pagès)
9 avril 2017 – Sortie de l’album Tour du monde
avec Hélène Piris (Paroles, musiques, violoncelle, voix), Oriol Martinez Codinachs, Yves Perrin, Frédéric Bobin (guitares), François Puyalto (contrebasse), Mathieu Manach, Julien Delooz (percussions) Quatuor Yako (Cordes) Florent Jouguelet (piano), Alban Lebrun (violoncelle) Pascal Cacouault et beaucoup d’autres musiciens présents (chœurs)
Quelle bonne idée de naître au printemps, au plein cœur d’avril quand le vert vous pousse vers demain !
Quelle bonne idée de s’enfermer en studio en janvier avec quelques être chers, plus d’une douzaine, pour donner corps à ses rêves de chansons !
Hélène Piris nous livre un album de printemps, comme un grand couturier vous livrerait sa nouvelle collection, en quête de beauté, bien entendu, de charme, de sensualité. L’objet que nous avons dans les mains respire tout cela : la sortie d’un album c’est un moment d’exception, un rendez-vous avec son public. Le fidèle tout comme celui que l’on n’a pas encore atteint. Pour l’accueillir, on s’apprête. Teintée de sépia, avec juste la note pastel d’une bouche légèrement souriante et rosée, la couverture nous offre un beau visage de jeune femme, incliné, yeux fermés. Sérénité, paix intérieure… Le mascara allonge les cils et le fard scintillant, bronze ou doré, dessine une paupière parfaite. Quand on ouvre, on découvre le même visage levé, yeux grand ouverts comme pour dire : « Me voici ! Je te regarde. Ecoute-moi et je t’écouterai. »
Nous avons écouté… Longuement, patiemment nous nous sommes laissé guider dans un Tour du monde d’un genre bien singulier. Sans forfanterie, sans prétention ni ostentation Hélène Piris a choisi l’acoustique ; ici aucune concession aux modes. Pas de boucles, pas de recherches numériques. De l’authentique, du vrai, du ressenti sous les doigts et dans les voix.
On avouera y avoir pris un plaisir indicible, comme un retour aux sources de la musique, celle du monde, oui… L’invitation au voyage commence là, dans la samba, la bossa nova, le jazz, les ballades. Guitares, contrebasse, percussions, où Hélène Piris glisse la mélancolie de son cello, rejointe aussi par tout un quatuor dans deux chansons. On pense alors à Bïa, à cette voix brésilienne qui navigue entre les continents. Mais le voyage c’est aussi suivre le fil de sa voix qu’elle fait douce, proche du murmure, de la caresse et qu’elle peut élancer haut comme pour suspendre au ciel sa prière ou sa peine.
Quant aux textes des chansons, on découvre partout la joie d’être vivante, d’être amoureuse. Cette joie affleure, palpite entre les vers. Elle rend hommage à La belle Phocéenne, avec pour toile de fond un amour délicat qui l’escorte, à la Provence originelle qui accueillit un jour ceux qui avaient dû fuir leur terre, l’Algérie. Elle recourt alors au point de vue du père qui livre, se délivre avec pudeur. Un lourd passé le hante : jasmin, et fleurs d’oranger… Morts, blessés, enfant sauvé… Cette chanson, Les montagnes de l’Atlas est d’une rare finesse pour évoquer un thème rarement entendu en Chanson.
On ne saurait trop dire le bienfait d’écouter cet album qui n’exclut ni le deuil, ni la perte, ni la mort surtout mais qui offre la douceur, la tendresse pour ultime recourt.
On trouve audacieux d’avoir refermé cet album sur le titre Quand la mort viendra. Mais quelle conclusion ! Entre guitare jazz et cordes, elle évoque l’ultime départ dans un murmure d’amour…La voix s’éteint sur ces mots : « Toujours s’aimer /Toujours t’aimer »… Et l’on comprend alors l’image de couverture : Je dirai adieu /Au monde et ses merveilles /je fermerai les yeux /Pour sentir le soleil /Je verrai la mer /Derrière mes paupières : C’était hier… »
Pour tout dire cet album est un hommage à l’amour qu’il faut sans cesse « planter et replanter », comme l’écrit Claude Nougaro. Un amour pour une terre, un être humain (tendre portrait cinématographique d’un couple en Ombres chinoises à leur fenêtre…), un chien – seul soutien parfois des paumés, des exclus. Parfois il y a urgence et on ne le sait pas « car il suffit d’un jour de trop pour un bel acte manqué…» (Tu n’auras jamais lu ma lettre). On peut croire que partir, faire le tour du monde peut offrir « de grande saveurs /Peut-être de nouveaux repères… » alors que la beauté est là, à portée de main ou de regard. « Qu’est ce qu’on fait après /Quand on en a fait le tour /Le tour du monde » … ? Suffit seulement de ne pas se laisser aller au mépris, à l’ennui, au repli : « Mais ouvre les yeux, mon gars /Pour être heureux, il faut /Des amours, des potos /Une passion, un combat /Et juste ta tête et tes bras ». Suffit de ne pas chercher son Eldorado, « Plein d’or et de diamants », loin, au prix de destructions, de saccages, de batailles perdues, ailleurs que là, tout près, dans « l’enfant qui ferme les yeux » … L’amour encore. Toujours.
Et vous écouterez le solo de la guitare et vous chanterez vous aussi en chœurs : « Y’a pas, y’a pas, y’a pas /D’Eldorado /A part tes bras, tes bras /Contre ma peau ».