Xavier Besse, Les mots qu’on dit – 2020 (©Serge Féchet)
18 mars 2020, 2ème album de Xavier Besse, 16 titres
Les mots qu’on dit
Avec
Textes & Musiques, sauf La retraite Allain Leprest /Romain Didier– L’arc-en-ciel d’un quart d’heure Georges Brassens /Xavier Besse – Le dormeur du val, Ma Bohême Arthur Rimbaud /Xavier Besse – Si vous n’avez jamais d’enfant Thierry Camus /Xavier Besse –Elle t’attend Laurent Berger – On s’ra jamais vieux Bernard Joyet -
Xavier Besse (arrangements, piano, voix) Sébastien Barrier (arrangements, piano), Jean-Marc Roulet (guitare) Jean-Pierre Raillat ((cordes, trombones, bandonéon, arrangements, mixage et master) Participation de Lise Martin et Emma Staël (voix)
Vous aimez la belle chanson, celle qui va l’amble, une allure noble et familière… Alors cet album de Xavier Besse est pour vous ! Vous y découvrirez un piano, comme savent y trouver leur mesure, leur cadence, tant de chanteurs aimés – Romain Didier, Jean-Sébastien Bressy, Jeanne Cherhal, Barbara, Véronique Pestel pour ne citer qu’eux – que rejoignent par instant, le lyrisme des cordes, violon et alto, la nostalgie du bandonéon… Le tout vous donne envie de vous attarder à la voix intime, de vous laisser séduire par le ton de la confidence. Au fil des chansons, vous feuilletez un cahier où sont consignés des mots amoureusement tracés aux côtés de ceux de quelques illustres compagnons de voyage : Allain Leprest, Georges Brassens, Arthur Rimbaud… et des amis, Laurent Berger, Bernard Joyet… Le voyage, c’est précisément ce que propose le livret élégamment orné de petites photographies.
Dans cet album Xavier Besse a pris le parti de rassembler reprises et compositions, comme il en est coutumier en scène, rendant hommage par là-même à ceux qui l’ont nourri. La couverture présente l’homme qui marche entre deux rails de chemin de fer, une valise à la main d’où se sont échappés des livres abandonnés sur le ballaste… A l’intérieur de la couverture notre voyageur est assis dans un champ fraichement fauché, au milieu des balles de foin sur un élégant fauteuil… En quatrième de couverture où s’alignent les seize titres, il pose, assis, tranquille, sur la voie de chemin de fer, dans ce même fauteuil, valise à ses pieds. Ces illustrations de ciel bleu, de verdure, d’oubli des réalités, sont loin de ce qu’évoque la première chanson J’ai mal à ma France, la seule d’ailleurs dans ce registre. On soulignera que ces vers où s’expriment les regrets et l’indignation s’ouvrent pour finir sur l’espérance, sur « un bout de ciel bleu… comme un coin d’enfance. »
Au fil des chansons se dessine le portrait du poète, rêveur impénitent « de paresse et de vent ». Dès l’enfance lui naît le goût des vers. Alors, tout naturellement cet album est un hommage à la poésie. Du mot même il fait une chanson, La poésie, où il cherche se définition « C’est s’asseoir tout au bout du môle /Rire à la mort sur ton épaule… ». S’en suit tout naturellement Les mots qu’on dit, en duo avec la voix profonde de Lise Martin. Bien entendu on ne saurait parler de poésie sans avoir la faim, la soif des mots, « comme un frisson d’abeille », quand la peur vous guette, la douleur ou l’ennui, et même la mort. Mais ils sont là les mots pour dire aussi l’émotion devant un paysage. On les valse alors comme dans le titre Entre Cancale et St Malo. Ils font naître le rêve – même celui de ne jamais devenir vieux, avec l’aide du facétieux Bernard Joyet – la nostalgie, Moi y’ en a remonter le temps. Avec eux tout est permis : ils vont jusqu’à donner vie à un vieux buffet « dans une maison blême et qui sent l’ordinaire »… Dans ces dix quatrains d’alexandrins on se prend à croire que l’auteur a pris la main du jeune auteur du sonnet, Le Buffet. Dans Ma Bohême, autre poème d’Arthur Rimbaud, le piano se fait alerte et léger. Il ajoute de la joie à l’évasion de l’adolescent …
Parfois on les retient ces mots, par excès de pudeur. L’amour tarde à s’exprimer ou prend bien des détours. Il emprunte alors à Laurent Berger le portrait délicieux et triste dans Elle t’attend où se pose la douce voix d’Emma Staël. Xavier Besse signe aussi une superbe chanson d’amour sobrement titrée Je t’aime. Hélas, comme rien ne dure, la réalité rattrape le rêveur ; C’est fini, « le cœur en feu [voit] flamber ses ruines ». Mais c’est avec un texte de Georges Brassens, L’arc-en-ciel d’un quart d’heure, qu’il exprime la fragilité des instants de beauté et de bonheur, « l’adage a raison : la meilleure /chose en traînant se dévalue. /l’arc-en-ciel qui dure un quart d’heure /personne ne l’admire plus. »
Leçon de sagesse de l’oncle Georges qui sonne étrangement à l’heure où nous écrivons…