Barjac m’en chante 2019 – David Sire & Cerf Badin – Thomas Fersen (© Luc Allegier)

Bar­jac m’en chante 2019 – David Sire & Cerf Badin – Tho­mas Fer­sen (© Luc Allegier)

29 et 30 juillet 2019 – Jour­nal de bord d’une enchan­tée – Actes 3 & 4

Bar­jac m’en chante 2019

Avec
Acte 3 :
Lec­ture et chan­sons d’Elie Guillou– Remise du Prix Jacques Douai à Yvan Dau­tin et Gérard MorelLes décou­vertes du Pra­det : Alexan­dra Gati­ca – Chouf le Hard­cordes TrioLes Ren­dez-vous de l’espace Jean Fer­rat : Juliette CaplaClaire Bel­la­my – San­se­ve­ri­no, hom­mage à Fran­çois Béran­ger
Acte 4 :
Les décou­vertes du Pra­det : Zoé Simp­sonPierre Paul Dan­zinLes Ren­dez-vous de l’espace Jean Fer­rat : David SireCerf BadinTho­mas Fer­sen en solo


Salle du châ­teau, Espace Jean Fer­rat (cour du châ­teau), Salle Trin­ti­gnant, Jar­din des papo­tages, Cha­pi­teau du Pra­det– Bar­jac (Gard)

Bar­jac m’en chante, jour 3.

Cette jour­née s’ouvre sur une lumière… Au Jar­din des papo­tages Élie Guillou, sa lec­ture, ses chan­sons en langue d’ailleurs, me prennent par le cœur… Il écrit et sauve ain­si des ins­tants de voyage à plon­ger dans les yeux d’hu­mains, femmes, hommes en armes, enfants au bord du pré­ci­pice… C’est bou­le­ver­sant d’au­then­ti­ci­té… Pas d’exo­tisme… Élie n’est « pas venu pour piller leur drame ». Le Kur­dis­tan, la Syrie… toute une his­toire de déchi­rures innom­mables … Seule­ment la véri­té des regards qui se parlent et par­fois se com­prennent, très au-delà des mots… On ne sau­rait faire autre­ment que d’es­pé­rer la publi­ca­tion de ces textes. Vite… !

Élie Guillou laisse la place – plus pré­ci­sé­ment, la petite scène posée au sol sous la fron­dai­son d’un vieux charme – à la remise du Prix Jacques Douai. Depuis 2007, ce prix honore une per­son­na­li­té ou une struc­ture qui fait vivre la Chan­son, avec le sou­ci d’élever le public, de l’« éman­ci­per par la Culture et l’Éducation Popu­laire ». Cette année ils seront deux à rece­voir ce prix : Yvan Dau­tin et Gérard Morel. Cha­cun appré­cie­ra la per­ti­nence de ce choix.

A 17 h le cha­pi­teau accueille d’a­bord trois filles, remar­qua­ble­ment belles et enjouées dans leur par­tage musi­cal qui nous offre des airs à dan­ser, à bou­ger de son siège… Des airs qui ramènent Alexan­dra Gati­ca, Lola Malique et Cla­ra Noll, dans des terres loin­taines… Un autre voyage encore… Au fond, c’est bien ce que l’on attend de la Chan­son et le prix Mous­ta­ki 2018 (ce n’est pas rien !) a certes toute sa place sur cette scène. Ensuite j’é­coute, ravie, le long ins­tru­men­tal du Hard­Cordes trio (vio­lon, alto, vio­lon­celle) et je savoure cet ins­tant avant que Simon Chouf ne vienne pro­po­ser ses textes empreints d’hu­ma­ni­té… Une huma­ni­té qui s’in­ter­roge, dans une écri­ture sub­tile, sur ce monde en dés­équi­libre, sur les êtres que nous sommes et qui ont bien des défis à rele­ver ! Le groupe se donne dans ce concert avec une éner­gie et une joie qui emportent le public.
Plus tard la soi­rée s’ouvre sur un duo qui me laisse per­plexe… Juliette KaplaClaire Bel­la­my… Contre­basse voix, tout ce que j’aime pour­tant. Je me suis per­due dans leurs pro­po­si­tions sans suite, mal­gré l’é­vi­dence de leur talent vocal, ins­tru­men­tal… Fina­le­ment cette soi­rée res­te­ra mémo­rable avec le concert en solo de San­se­ve­ri­no ren­dant hom­mage à Fran­çois Béran­ger… Le redou­table gui­ta­riste de blues se lance dans les textes avec fougue, fré­né­sie, joie débri­dée d’être en scène… Tout à coup ce sont mes années 70 qui reviennent à la vie… Le comble, c’est que le conte­nu liber­taire n’a pas pris une ride.
Moi si !… Et pas qu’une !
Le monde est tou­jours à refaire et je ne ferai pas de marche arrière avec mes ‑presque ! – soixante-dix ans !
L’in­vi­ta­tion sur deux titres d’Eric Fra­siak – autre amou­reux fidèle aux chan­sons de Béran­ger – me comble de joie ! Et je ne suis pas seule, de toute évi­dence ! Je me dis alors que ces par­tages éphé­mères jus­ti­fie­raient à eux seuls l’exis­tence d’un tel festival…

Bar­jac m’en chante, jour 4

C’est une jour­née sin­gu­lière. Une bien belle jour­née vrai­ment qui ne débu­te­ra qu’à 17 h au cha­pi­teau, pour cause d’anniversaire et de quan­ti­té de mes­sages et de gestes pour me le fêter ! C’est ma « fête », comme ils le disent au Qué­bec ! Et ça vaut bien que je savoure ce moment d’amitiés à foi­son… Et de chan­sons ! Au cha­pi­teau c’est d’abord Zoé Simp­son dans sa tenue rouge, avec ses longs che­veux sur les épaules et cette façon bien à elle de sou­li­gner ce qu’elle chante d’un mou­ve­ment répé­té de ses bras, de ses mains… Por­tées par une gui­tare élec­trique, un vio­lon (je m’évade dans quelques solos aériens) par quelques ajouts d’électro (tiens, tiens, un ordi­na­teur en scène à Bar­jac ! Voi­là qui est nou­veau ! ) ses chan­sons sont pour beau­coup des hom­mages aux femmes, à com­men­cer par les sacri­fiées aux dési­rs et aux folies des hommes « per­dues dans l’orage et pour du vent », comme l’innocente Iphi­gé­nie de la Grèce mytho­lo­gique. C’est Lise, sa mère, ses « racines félines » qui est le fil rouge de ce spec­tacle. On décèle même un tem­pé­ra­ment de rockeuse quand vient Novembre sous les cendres… Le trio de Pierre- Paul Dan­zin me ramène ensuite d’emblée dans mes années 70, dans ce temps des voix qui por­taient haut et fort la révolte des hommes, leurs com­bats pour que jamais ne meure l’espoir, avec l’ardente pré­sence de l’accordéon. J’y recon­nais Gilles Puy­fages, fidèle aus­si à Patrick Ochs /​Rue de la Muette dont il serait bon de se sou­ve­nir aussi…

Quant à la soi­rée, elle sera lunaire… Une échap­pée belle dans les hautes sphères de l’écriture. Un brin de folie avec la pré­cieuse « bidu­lo­so­phie » de David Sire, avec le jeu de son com­plice gui­ta­riste- clown, le dénom­mé Cerf Badin, maître es bidu­lo­so­phie… C’est géné­reux, huma­niste – ô com­bien ! – c’est un spec­tacle déli­rant et pro­fond dont je ne me las­se­rai pas tant il est jubi­la­toire. La cour du châ­teau de Bar­jac est alors prête à accueillir Tho­mas Fer­sen qui nous arrive en che­mise et bon­net de nuit… Et c’est par­ti pour un tour de manège dans un solo pia­no voix, des récits par­lés et chan­tés où se dressent quan­ti­té de per­son­nages aux confins de l’absurde, des fra­giles qui se débattent avec leurs peurs, leurs dési­rs, pour finir dans un grand rire…Le fou rire quoi… ! La Chan­son s’offre du grand art théâtral !