Tribute to Nino Ferrer (© Claude Fèvre)
27 juillet 2016 – Festival Toulouse d’été, Tribute to Nino Ferrer (création)
avec
La bande à Nino
Éric Lareine, chant – Alima Hamel, chant – Chouf, chant – Hervé Suhubiette, chant – Djazia Satour, chant – Hakim Amokrane, chant – Mustapha Amokrane « Mouss », chant – Mathias Imbert « Imbert Imbert », chant et contrebasse – Zedrine, chant – Soan, chant – Ghislain Rivera, batterie – Kévin Balzan, basse et chant – Samir Laroche, clavier – Étienne Choquet, guitare – Nicolas Pujos, saxophone – William Laudinat, trompette – Guillaume Pique, trombone
Jardin Raymond VI (Toulouse)
Nino, un être dévoré par le sentiment de l’absence, de la quête d’un impossible rêve. Si « l’affreux Jojo préposé aux chevaux-vapeurs » a pu nous amuser, peut-être ce portrait décalé dit-il aussi le sentiment de ne pas être capable de comprendre ce qu’il fait là et pourquoi. Car le sentiment qui court tout au long, c’est la mélancolie, celle de La maison près de la fontaine, celle de Un premier jour sans toi, de Je voudrais être noir…
Belle la vie, oui, belle ! Saisissons vite l’occasion de partager cet instant éphémère, unique dans un beau soir d’été, dans un lieu somptueux en bord de Garonne, avec un public réunissant les générations.
Tribute to Nino Ferrer fête un répertoire alliant chansons populaires et chansons plus confidentielles, sensibles, profondes. On peut s’époumoner à chanter en chœur, taper joyeusement dans les mains tout à la joie de partager puis, simplement frissonner, s’émouvoir de cette part intime, presque douloureuse parfois qui nous est confiée et que beaucoup découvriront ce soir. Une vie d’homme en somme, belle et fragile.
Même si le premier morceau qui les réunit tous en scène nous laisse perplexe… tout n’est pas franchement à sa place dans Les cornichons, – ce grand pique-nique raté (!) diffuse une onde de joie bienfaisante. Par le long instrumental teinté de rock et de jazz qui ouvre le concert – cuivres à la fête avec batterie, clavier, guitare et basse – on a vite compris que l’excellente formation orchestrale donnerait l’unité. Et c’est effectivement une dimension importante de cette soirée que de voir chaque chanson trouver sa couleur grâce à des arrangements différents.
Imbert Imbert y ajoute souvent sa contrebasse pour quelques moments plus émouvants que l’on apprécie tout particulièrement : Je cherche une petite fille, puis L’année de la Comète avec Hervé Suhubiette au chant et au piano, chanson ô combien prophétique, Les enfants de la patrie avec Zédrine, La maison près de la Fontaine avec Alima Hamel dans une version superbe à laquelle s’associe la trompette bien sûr… Est-ce aussi sa peau couleur café, sa chevelure frisée qui l’auréole dans les lumières, sa robe blanche et ses pieds nus qui nous donnent cet instant de grâce ? Quels frissons à l’entendre chanter Un premier jour sans toi !
Bien entendu on pouvait aussi s’attendre à la générosité, à l’élan joyeux des deux frères Amokrane. Ce fut fait avec Les hommes à tout faire et Le Sud. Ces deux-là ont un talent fou pour vous donner envie de les suivre, en chantant, en dansant comme à la fête populaire. Quant à Chouf et son aîné, son maître (?) Éric Lareine – incroyable fou de la scène dans Je voudrais être noir, on le soupçonne d’y croire vraiment ! – c’est du côté du rock qu’ils nous entraînent. Disons tout net que l’on verrait bien Ulysse s’ajouter au répertoire de Chouf en scène.
Djazia Satour, sa voix de chanteuse de blues, de soul, ajoutent une agréable note de charme et de mélancolie aussi avec Au bout de mes vingt ans : « Au bout de mes vingt ans, la route est vide /Et je m’ennuie. /J’ai perdu mes amours et ma jeunesse, /Et mes amis ». Quant à Zédrine avec ses textes dits plus que chantés, il rappelle avec justesse l’écriture de Nino Ferrer, sa portée, son étrangeté parfois, sa beauté. Réécoutons L’arbre noir pour nous en convaincre et toucher du bout du cœur le mal qui nous étreint quand l’autre nous quitte : « Rien n’est changé, tout est pareil /Tout est pourtant si différent /Il flotte comme un goût de sommeil /Ou de tristesse… ».
Notre seule réserve sera pour Soan… Mais que vient-il donc faire là ? On se serait laissé convaincre au premier passage par sa voix de rocaille dans Agata, mais il massacre la deuxième chanson. Et, cerise sur le gâteau, il manque totalement du respect dû à ses partenaires et au public en s’affichant bière et cigarette à la main au salut final. Dommage !
On oublie ce détail qui fâche quand la soirée s’achève sur l’incontournable Téléfon et sur ce Gaston qui ne vient toujours pas !
J’ai beaucoup apprécié cet article sincère dans ses propos, sur une soirée hommage à un de mes artistes français préférés : un talentueux pionnier trop souvent réduit à quelques refrains entraînants et décalés …
Albert Weber
Cher Albert, c’est un plaisir de te lire ici… C’était une belle occasion de mesurer le talent d’un artiste assez mal connu, malgré ses gros succès… Et puis l’occasion aussi de revoir en scène des amis. Un bien beau travail ! Éphémère…si qui n’a fait qu’amplifier mon envie d’écrire…A bientôt ! En amitié. Claude