Caroline Fédi –2018 (©Philippe Petit)
30 décembre 2018, Caroline Fédi premier album enregistré le 13 mai 2018 à Ferran (Aude)
14 chansons, 1 heure en live
Avec
Caroline Fédi (accordéon, chant), Erwens (guitare, voix), Jean-Marie Pons (percussions, voix)
« J’veux du soleil
J’veux traverser des océans
Et devenir Monte-Cristo
Au clair de lune
M’échapper de la citadelle
J’veux devenir roi des marécages
Me sortir de ma cage
Un Père Noël pour Cendrillon
Sans escarpin »
Il y a des jours comme ça, des jours où l’on s’attarde aux rives d’une joie simple et vraie. Des jours où l’on veut chanter et danser pour rendre le monde moins laid, la vie moins dure. Alors, quand on a la chance que des artistes vous proposent un peu de leur lumière, on s’en saisit vite et l’instant de l’écrire, on sauve ce rayon de soleil…
Vous le connaissez ce soleil, celui de la chanson du groupe Au p’tit bonheur, comme un appel, une invitation, une prière sur laquelle a dansé toute une jeunesse, au début des années 90. C’est bien une des fonctions essentielles de la chanson, nous faire rire et chanter, nous émouvoir, nous faire danser. Cette chanson que Caroline Fédi honore dans cet album live où elles glissent subrepticement deux titres personnels dans un ensemble de reprises. On retiendra particulièrement T’as beau être beau, aux côtés de la chanson de Bénabar Je suis de celles… Paroles dont on la remercie.
Aucune surprise à découvrir que l’accordéon l’accompagne, cet instrument qui nous vaut, aux yeux du reste du monde, d’être un pays qui se distingue musicalement… Cet instrument qui fleure bon la tendresse et la nostalgie, les bals du quatorze juillet, ces bals populaires que des envahisseurs, en des temps sombres, s’empressèrent d’interdire…
Cet album vient du pays du soleil, de cette région d’Occitanie qui flirte avec la méditerranée et qui a vu naître Charles Trenet, Boby Lapointe, Georges Brassens… Caroline Fédi est de ces artistes du Sud qui colportent dans les villes et les villages, sur les places et dans les cours, leur amour insensé de la chanson. Certains en font des évènements, des rendez-vous où ils invitent les copains, des fous comme eux, autour des chansons qu’il faut bien nommer un patrimoine… On citera volontiers Erwens qui accompagne Caroline à la guitare, ou bien le marseillais Jean-Marc Dermesropian. Les reprises que certains pourraient être tentés de considérer avec condescendance sont essentielles à la vitalité de la chanson. Et surtout le public en réclame.
Le concert enregistré à Ferran dans l’Aude, mixé à Amélie-les-Bains- un pur produit du Sud, on vous le répète- commence avec l’explosion joyeuse des images poétiques de Y a d’la joie de Charles Trenet, et s’achève avec une chanson de Michel Leeb propre à entraîner tout un public bon enfant « Y a une boum … dans le bar tabac d’en bas… Y a du swing…Y a du jazz…Ya du rock… Y a du rap…
Si Caroline Fédi prend un vif plaisir à reprendre Boby Lapointe (T’as pas, t’as pas tout dit, Ta Katie t’a quitté, Comprend qui peut, La maman des poissons) à défendre sa poésie surréaliste en diable, ses mots qui s’entrechoquent, s’épousent avec brio – un défi pour tout interprète. Si, entourée de ses deux musiciens qui donnent aussi de la voix, elle incite à danser, elle défend des titres sensiblement plus émouvants, voire poignants. On citera La tendresse dont Bourvil fit un titre essentiel, S.D.F, superbe chanson d’Allain Leprest et Romain Didier, dont on ne se lasse pas. On aura aussi plaisir à entendre- beaucoup moins connu sans doute- Malgré moi, de Imbert Imbert, un hymne à l’amour dont on se fait une joie de citer ces quelques vers dans la longue liste de laideurs de notre monde « Y a de la haine, on est d’accord /Y a des grenades et y a des morts /Des bouts de peau, des parcelles de corps /Y a du chagrin, y a des adieux… Y a des forêts qui brûlent encore /Des fumées noires mais des contrats en or /Y a des extincteurs de baleines… » Pour finir par cette pirouette, cette dédicace de survie : « Et puis à vous je dédie ma chanson. /Vous êtes ici tout près de moi /Vous accompagnez mes émois /Et mes dérives /Vous me renvoyez du bonheur /Beaucoup d’espoir et quelques heures /D’envie de vivre /Bien malgré moi. »
Eh oui, bien malgré nous, les chansons, les concerts ont ce pouvoir, celui de nous faire oublier pour quelques minutes, une heure ou plus, « tout ça dans un seul monde /… Un coup à faire péter quelques bombes… » De mettre de la couleur sur le gris, du soleil sur nos vies. Et tant pis, si ces mots simplistes font sourire, c’est grâce à vous tous, Caroline Fédi et les autres, Amis de Boby, Amis de Georges, grâce aux chansons de toujours, d’aujourd’hui et bientôt de demain que certains jours on reste en vie !