Barjac, Marie Baraton (©Vincent Leclerc)
1er août 2016 – Barjac m’en Chante, Marie Baraton
avec Marie Baraton, chant, Pierre-André Athané & Michel Haumont, guitares
Chapiteau – Barjac (Gard)
Des textes doux amers, amoureux. Et voilà un album aux arrangements délicats, aux musiciens délicats, comme un écrin à la voix vibrante et sincère de son interprète. Une chanson qui fuit la mode et le bruit, et une chanteuse d’exception
Le concert de Fabien Bœuf vient de nous laisser quelque peu perplexe. On s’interroge encore sur les chansons de ce jeune artiste qui esquisse sans fin ses paysages intérieurs, des voyages intimes – si intimes que l’on cherche le moyen de les partager – aquarelles, esquisses où nous avons tenté en vain de nous immiscer. La voix est claire, l’accompagnement violoncelle et guitare électrique aurait pourtant de quoi retenir notre attention. Mais le charme n’a pas opéré. Comme un plat aux ingrédients raffinés, aux senteurs appétissantes que l’on n’aurait pas pu goûter… Pas le lieu, pas l’heure ?
Avouons que l’attente est d’autant plus forte quand commence le concert de Marie Baraton entourée – portée devrait-on dire- par deux guitaristes qui lui offrent un maillage sonore subtile et efficace, souvent très jazzy… au point que parfois on aurait aimé les entendre davantage encore. Ajoutons d’emblée que l’un d’eux, Pierre-André Athané, est bien plus qu’un musicien accompagnateur puisqu’il signe la plupart des textes et des musiques de ses chansons. Marie Baraton est donc de la famille des interprètes. Détail qui à Barjac – et très souvent ailleurs – revêt son importance.
Elle gagne la sympathie du public dans les premières secondes. Elle l’apostrophe visage ouvert, souriante. Dans sa robe fraîche, coupe années cinquante, blanche piquetée de petits motifs, elle a quelque chose d’hier, d’avant-hier… Une fraîcheur. Un petit air d’innocence. Comme ces photographies noir et blanc de l’été 1936…C’est ainsi qu’elle nous est apparue : « vintage »… Le mot est très mode, on l’avouera volontiers, mais il lui va si bien. Cette belle voix, haute et claire qui parfois a les accents d’une chanteuse de fado, une interprétation et surtout des textes qui nous ramènent obstinément dans le passé, celui d’une chanson qui fêtait la vie. Elle emboîte même le pas à Charles Trenet ou Jacques Prévert quand elle chante la déambulation de la Tour Eiffel dans Paris.
Barbara écrivait « en ce temps –là ça guinchait, ça dégingandait, ça chaloupait, ça énamourait … » Oui, Marie Baraton c’est un peu de ce temps-là… Sauf qu’elle n’y « politique » guère… Ce n’est certes pas la « criée du quotidien », c’est même tout le contraire comme si ses chansons devaient nous protéger des rumeurs de la ville, de la vie. Elle voudrait tant « avoir un cœur d’or et de miel /Eloigner le doute et le mépris /Poser sa joue sur l’arc en ciel… ». Et c’est cette image que nous gardons d’elle quand elle quitte la scène.
Elle n’ignore rien pourtant des épreuves, de « cette saloperie d’comédie » qu’il nous faut vivre, elle sait que les plus belles fleurs finissent par faner. Elle n’ignore pas les dérives, les méprises de l’amour et surtout pas les pires, celles qui mènent aux violences (terrible chanson Tu silences). Elle-même a dû faire face à sa singularité qu’elle évoque tendrement dans Ma petite main. Oui, elle sait que parfois « Tout part à l’envers /Ma plume en hiver »… Mais elle semble protégée de l’amer, de l’amertume. Elle sourit à la vie et nous emporterons cette folie douce. Très, très douce… Car contrairement à ce que dit sa chanson Ma folie aime nous ne l’avons guère vue dans « les mises à sac, pieds dans la flaque /Les doigts sur les portes qui claquent »… Et c’est un peu dommage. On aurait aimé qu’elle dégrafe son corsage, son corps –trop- sage… « Rebelle et langue de vipère » en somme…
« Rouler par terre » au risque de salir la petite robe claire…