La grande Famille- Avril 2022 – Le Flegmatic (©Claude Fèvre)
15 avril 2022 – Concert de Le Flegmatic - Emil Möwe (première partie)
Je t’aime mélancolie
Avec,
Le Flegmatic /Thomas Boudineau en solo (guitare, harmonica, clavier, voix)
Première partie : Emil Möwe /Maurice Fontaine (guitare acoustique, harmonica) & Jim Bergson (arrangements, guitare électrique, clavier, voix)
La Grande Famille - Pinsaguel (Haute-Garonne)
Quand tout est gris, la peine est mon amie
J’ai l’âme humide aussi, tout mon être chavire
Oh, viens, je t’en prie, c’est ton amie aussi
C’est l’élixir de mes délires, je t’aime mélancolie
Mylène Farmer
Ce soir, direction Pinsaguel au sud de Toulouse pour retrouver l’atmosphère chaude et rassurante du café culturel La Grande Famille, là même où nous avons partagé, tout récemment, la « saudade » des poètes portugais et leur chant émouvant avec la chanteuse Lizzie. Et nous allons découvrir qu’avec les deux chanteurs présents nous n’en serons pas si loin… La mélancolie des textes et du son des guitares s’invite et nous rappelle Je t’aime mélancolie que chantait il y a vingt cinq ans Mylène Farmer… L’occasion de revoir son clip et son personnage de boxeuse ? A vrai dire, sans que personne ne se soit appesanti sur notre réalité politique – ô merci ! – nous sommes tous un peu boxeurs face à cette adversité et nous avons « l’âme humide »…
La venue de Flegmatic, « folkeux » s’il en est, inspiré dit-on par le songwriter Bill Callahan, a offert au patron du lieu l’occasion de faire sa toute première scène avec cinq chansons de son album Consolament, titre aux consonances spirituelles. C’est qu’il s’agit là rien moins que d’une consolation avec soi-même et d’une forme de baptême, une venue au monde comme auteur-compositeur-interprète après tant et tant d’années à créer… En quelques mots Maurice explique : « Si j’ai choisi de mettre au monde et incarner le personnage fictif d’Emil Möwe (prononcer Meuve) le choix de ce pseudonyme ne doit rien au hasard. Je convoque ici, avec nostalgie, l’histoire de mon grand-oncle Emile, bourlingueur des mers, surnommé la mouette, dont enfant, je suivais les aventures rocambolesques à travers les cartes postales reçues des quatre coins du monde par ma grand-mère paternelle. » Et c’est pour convoquer l’âme de ce grand-oncle qu’avec son accompagnateur – brillant guitariste, disons- le, doublé d’un arrangeur et d’un remarquable technicien du son – il arbore un brassard de communiant, ce communiant de la pochette de l’album qui, du haut de son si jeune âge, s’apprête à affronter les mers.
C’est avec une délicate image de flocons de neige « qui se déposent sur [une] épaule ronde » que s’ouvre la soirée… avec en conclusion cette promesse « Je te promets qu’il neigera /Encore longtemps /Sur l’océan… » Dans cette vie « de vertes et de pas mûres », comme le chantait Nougaro, il est quelques refuges, comme cet amour là, précédemment évoqué, comme la forêt « Même si le vend du Nord me rappelle /Les échos lointains de Babel… », comme l’amitié, quels que soient les combats à mener « Oh, mon ami Monkey /Ton sourire de traviole /Me désarme et m’enchaîne »… Gardons l’espérance que les anges au ciel entendent nos S.O.S, nos vœux, chaque fois que nous les prononçons : Auguri a te, dit le titre italien de sa chanson. Ce duo offert en première partie nous donne à entendre cette parole et cette musique où se marient guitare folk et guitare électrique « Pour que la nuit se passe ».
Le Flegmatic – entendez le mot suivi de l’adjectif « britannique » – s’installera donc assez facilement dans l’atmosphère créée par le duo d’Emil Möwe. On ne le voit guère se départir de son sourire, de son contact simple et authentique avec le public qui lui fait, en retour, un accueil des plus chaleureux. Il alterne chansons anciennes et chansons nouvelles pour un futur et quatrième album à paraître en octobre 2022, Le jour La nuit Le jour. A vrai dire, pour nous, les chansons sont toutes nouvelles puisque nous découvrons ce chanteur et c’est l’occasion de souligner encore une fois l’abondance des propositions pour une Chanson que d’aucuns voudraient nous faire croire moribonde.
Nous voici entraînés dans un périple de sensations et d’émotions, avec la route, « Je roule à fond vers je ne sais où », et ces haltes incontournables dans les cafés. C’est ainsi que commence le concert, avec « l’ananas café » et ce personnage énigmatique de Maria. Le décor est posé, l’amour encore et toujours en trame de fond, celui que l’on guette, celui que l’on manque, celui qui torture et n’en finit pas de mourir… Quête permanente, hasardeuse, « Mais la route qui me mène à toi ne fait que changer », et toujours ce monde autour qui tourne mal et ces hommes paumés à l’intérieur, tels des hamsters dans leur cage… Le Flegmatic se peint le plus souvent en looser, comme ce jour où, autour de la table, tout le monde s’est moqué de lui… Sensation que l’on te donne les clefs « Mais on a changé les serrures »… Une chanson, une ancienne, précise-t-il, m’interpelle. Plutôt désarmante dans son côté cru : une scène de fellation offerte pour un anniversaire ( !) par une femme mue, pour l’occasion, en « robot » et lui « le regard au plafond à des années lumières de ce qui se passe »… Le point de vue de l’homme – enfin, dirions-nous ! – pour exprimer « ça te rend triste de voir que vous vous ratez ! » Melancholic song… On vous avait prévenus, guitare et harmonica bien sûr même si par deux fois il rejoint le clavier, notamment pour conclure en évoquant les tournées « Non je ne veux pas me rendre à Béziers… à Narbonne… » Ah bon ?