Chanson en Sorbonne (mai 2017) – Ensemble DécOUVRIR & Dani (© Claude Fèvre)
29 mai 2017 – Chanson en Sorbonne
Les 15 ans du Festival DécOUVRIR de Concèze
L’ensemble DécOUVRIR sous la direction d’Étienne Champollion (piano, rhodes, claviers, arrangements)
Louis Théveniau (clarinette et clarinette basse), Ugo Berardi (casson), Sarah Meloux et Benjamin Cloutour (violon), Mathilde Rouaud (alto), Agathe Leprince (violoncelle), Christophe Devillers (contrebasse), Quentin Roudreux (percussions), Émilie Marsh (guitares)
Accompagnant Clio, Buridane, Céline Ollivier, Clarika et Dani
Université Paris Sorbonne, Amphithéâtre Richelieu (Paris)
Cette soirée d’exception, à faire rêver plus d’un amoureux de la Chanson, est d’abord l’occasion de rappeler que le Festival DécOUVRIR de Concèze fête ses quinze ans. Bien entendu c’est le poète Matthias Vincenot – celui par qui tout arrive ici, en Sorbonne, et là-bas dans le petit village de Concèze ! – qui ouvre de quelques mots ce concert. Juste le temps de saluer l’orchestre qui sera la vedette incontestée de la soirée, et d’ajouter que le festival, fort de ses quinze éditions, est toujours aussi jeune et fragile. Il ne dira pas qu’un financement participatif a été lancé pour assurer sa pérennité. Mais bien entendu il est bon ici de le rappeler d’autant plus que c’est l’occasion de soutenir un évènement dont on ne dira jamais assez les qualités qui font sa rareté : la gratuité des concerts et la rencontre entre poésie ET chanson.
Cette soirée c’est l’occasion d’entendre chacune des artistes invitées dans un décor et avec un accompagnement l’un et l’autre somptueux… Avouons d’abord notre émotion d’entendre ici, sous cette coupole de l’amphithéâtre Richelieu, cinq chanteuses que nous suivons, que nous aimons. On ne peut pas ignorer que ce rendez-vous est lourd de toute une symbolique portée. En bavardant avant et après le concert, dans la cour d’honneur de la Sorbonne, on sent en nous comme un frisson… Grâce à l’entêtement de Matthias Vincenot, grâce à ceux qui l’accompagnent dans la réalisation de ses rêves, on imagine qu’enfin la Chanson accède à ses lettres de noblesse auxquelles certains créateurs l’ont incontestablement hissée. Et c’est bon d’y croire.
On peine à imaginer le travail en amont de cette soirée. Chaque chanson en effet a fait l’objet d’arrangements signés Étienne Champollion. C’est la raison pour laquelle nous pensons que ce concert c’est d’abord le sien et celui de son orchestre. Le temps de répétition aura été particulièrement réduit. D’ailleurs, chaque chanteuse a ses mots pour dire son admiration, sa chance et… son trac. C’est Clarika qui évoquera un souvenir cinématographique des années quatre-vingt : Sophie Marceau à la Sorbonne, passant son oral, dans L’Étudiante de Claude Pinoteau…
Nous serons à plusieurs reprises étourdis devant la beauté qui nous est offerte. Parfois dans la sobriété de la clarinette ou dans le romantisme des cordes… On notera par exemple le rôle de la clarinette basse dans le titre de Buridane, Sauvage, ou celui du piano et des cordes qui introduisent l’émouvante chanson d’amour de Céline Ollivier en conclusion de son passage… « Si j’avance c’est pour toi »… et qui s’achève comme un instant suspendu…
Car de l’amour il en a été question ! On pourrait même dire qu’il n’a été question que de lui… La grande affaire de nos vies ! Et rappelle Clarika à plusieurs reprises, c’est une affaire qui finit mal, en général… !
On notera d’ailleurs la force, l’énergie, le charisme de Clarika. Mais on aimera aussi beaucoup – nous l‘avons écrit l’été dernier à Concèze – le duo que Dani offre avec Émilie Marsh. Ces deux femmes se font une confiance absolue. On la voit, on la sent… On ne sait laquelle des deux est le soutien de l’autre… C’est un moment de complicité d’une grande beauté. Et c’est Dani qui chante « Non, l’amour ne dure pas… Combien de roses à peine écloses m’as-tu offertes, souviens-toi… » Et c’est elle aussi qui évoque la fragilité de toute vie, de tout sentiment, cette sensation qu’il s’en est fallu de peu pour que tout fût différent… « J’en tremble encore »…
« On ne badine pas avec l’amour », Musset, le film de Pinoteau, Sophie Marceau encore… Mais ce sont aussi les mots de la chanson de Clarika quand l’amour s’arrête… « J’en aurai encore pour le reste de ma vie »… À moins qu’on ne lui préfère ceux, mutins, espiègles de Clio qui tombe amoureuse tous les mardis… et malheureuse le lendemain.
Le plus étonnant, c’est que cette succession de chansons paraissait avoir sa continuité et sa logique. Commencée avec la jeunesse de Clio, qui paraît se jouer des sentiments amoureux, refuser de s’y torturer, poursuivie avec la quête identitaire plus douloureuse de Buridane, puis avec la troublante prière de Céline Ollivier « Ne tarde pas », le chagrin de Clarika, et pour finir la « sagesse » de Dani, « La seule chose pour laquelle il y a urgence, c’est l’amour tout court… »
Au-delà de l’amour qui paraissait nous envelopper tous dans cet amphithéâtre circulaire, ce qui a fait l’unité de la soirée c’est bien l’accompagnement des dix musiciens, l’ensemble DécOUVRIR enrichi pour cette soirée des guitares d’Émilie Marsh, offrant ses couleurs singulières à chaque chanson.
La soirée s’est poursuivie en terrasse, place de la Sorbonne… Il y était encore beaucoup question de musique, de poésie et de chansons comme si cette histoire d’amour là ne devait jamais connaître de fin.