CHOUF, Détours de Chant, sortie de l'album Volatils au Metronum (Ⓒ Claude Fèvre)

CHOUF au Metro­num (© Claude Fèvre)

5 février 2016 – Détours de Chant / Volatils

Chouf (chant, gui­tare), Simon Por­te­faix (bat­te­rie), Kevin Bal­zan (basse), Guillaume Pique (trom­bone, gui­tare), Daniel Dru (trom­pette, clavier)

Sortie de l’album Metronum (Toulouse)

CHOUF, Détours de Chant, sortie de l'album Volatils au Metronum (Ⓒ Claude Fèvre)

« C’est un tour­billon d’images inso­lites où se des­sine un monde violent qui vous plon­ge­rait dans les vignettes d’une BD d’Enki Bilal, sur fond de gui­tare élec­trique sauvage ».

Ce sont les mots qui sont venus sous notre plume en décembre en atten­dant le duo de Chouf avec Simon Barbe à l’accordéon. Il pré­sen­tait, encore hési­tant, les toutes fraîches chan­sons de son nou­vel album alors en gestation.

Le voi­ci ce soir sur la scène du Metro­num, dans ce nou­veau quar­tier de Tou­louse aux airs vic­to­rieux de ville nou­velle où le bâti­ment émerge ain­si que l’exprime le cabi­net d’architectes : « La nuit venue, de cette masse sombre se dégagent des effets de brillance comme la lave incan­des­cente et brû­lante que l’on peut aper­ce­voir lorsqu’un vol­can est en érup­tion ». Alors, vous l’aurez com­pris, c’est le cadre idéal pour que naisse en scène le pro­jet de Vola­tils en quin­tet réso­lu­ment rock.

La sono­ri­sa­tion nous offre qua­li­té et confort d’écoute pour appré­cier plei­ne­ment les arran­ge­ments, bat­te­rie, cuivres, trom­bone et trom­pette, gui­tares. Quant aux lumières, elles habillent cet uni­vers de Magie noire, son « malé­fique manège et ce tour [qui] a mal tour­né » qui ouvre le concert. Quelques mots vous agrippent et vous font mal à l’âme quand vous croyez recon­naître la chute des corps qui tentent d’échapper au pire. Voi­là que l’on vou­drait avec cette musique, der­rière Chouf, deve­nir oiseaux, hiron­delles ou simple fou­lard qui tour­billonne. Puis dis­pa­raître… volatils.

Car autour de nous, dans ce monde où il faut que « ça brille /​Que ça scin­tille » à tout prix, « ça va péter », on le sent, le pressent. « Y’a trop de guerres /​de chars d’assaut /​Pour des fron­tières /​Ces murs trop hauts. » Chan­son pré­mo­ni­toire, hélas… Et cette « amné­sie de l’Histoire » que l’on vou­drait voir finir.

Chouf, simple et jovial en scène, — c’est une de ses belles qua­li­tés d’artiste — serait-il lan­ceur d’alerte quand il chante ? Ce qui paraît une évi­dence c’est que ce monde furieux le secoue. Il s’agite en lui (Des aveugles, texte trou­blant de Chris­tian Oli­vier, ter­ri­fiante Baby Doll ou « dame blanche vêtue de cris­tal » qui n’est que mirage). Il s’agite autour de lui, lui ins­pire des textes, tan­tôt intimes comme cette superbe Nuit de silence offerte à sa grand-mère dont la mémoire s’égare – l’interprétation de ce soir et de l’album en est déchi­rante — tan­tôt si proches de l’actualité. Les cime­tières des oiseaux, le nau­frage de ceux qui se vou­laient « visi­teurs de nuages », qui rêvaient d’échapper aux fron­tières. Ce nau­frage-là n’aura-t-il donc pas de fin ? On en a, tout comme lui, le ver­tige : « La Terre tourne sur elle-même /​Et moi je tourne avec elle /​Dans l’autre sens » (Vie de ver­tige).

Bien enten­du, fidèles – nous sommes nom­breux ce soir ! — nous aurons de la joie à entendre avec cette nou­velle for­ma­tion quelques chan­sons du pré­cé­dent album. On sent que Chouf s’y délecte aus­si et l’on dira que la nou­velle ver­sion de Dérailler était par­ti­cu­liè­re­ment émou­vante ain­si arran­gée avec la place accor­dée aux cuivres.

On rentre chez soi, on écoute l’album et l’on se réjouit de sa qua­li­té, de sa per­ti­nence où la voix, les textes res­tent au pre­mier plan, ne se noient pas dans l’environnement ins­tru­men­tal. Il serait tel­le­ment dom­mage d’échapper à cet uni­vers où nous trans­porte Chouf, les yeux levés au ciel où volent les oiseaux. « Dans [sa] chute pro­vi­den­tielle, [il] attrape des fous, des hiron­delles… »

Il fait ça pour nous.