K ! Karina Duhamel 2018 (©Thomy Keat)
21 février 2019 – concert de K ! Karina Duhamel en trio
La Femme en boîte
Avec
K ! /Karina Duhamel (chant, clavier) Samuel Cajal (Guitare) Matthieu Le Sénéchal (claviers, programmations)
Le Bijou (Toulouse)
K ! est le projet de Karina Duhamel. Auteur, Chanteuse et bidouilleuse de sons et de mélodies. Autodidacte, Karina a, au démarrage du projet ressenti la nécessité de s’entourer de musiciens, de machines, pour donner corps à des univers délirants et décalés.
Après huit années d’existence ponctuées de récompenses et de reconnaissances professionnelles (Pic d’Argent à Tarbes, Finaliste du Prix Georges Moustaki 2015, lauréate du Tremplin Reims Oreille, Lauréate mégaphone Tour, découverte du magazine Francofans…), Karina affirme toujours sa singularité de chanteuse-conteuse de rêves. C’est fort de ce parcours et de cette dynamique que s’élabore le projet du Fantastik Show. Un spectacle et un concert bâtis autour des idées de magie, d’illusion, d’artifice. Un spectacle fait d’éléments factices, inventés ou réinventés. Des trucs et des trucages, l’idée de jouer du faux pour mieux conter les réels. Une manière aussi de s’affranchir de l’idée de performance pour entrer de plein pied dans le magique.
Il y a trois ans déjà, Karina Duhamel, autrement nommée K !, nous avait littéralement fait vaciller dans son Fantastik Show qu’elle menait avec un talent affirmé de comédienne autant que de chanteuse. Depuis, elle a sorti son premier album La femme en boîte et quitté son solo de magicienne, femme orchestre, machiniste, chanteuse… Cette fois, entourée de deux musiciens, guitare, claviers et quantité de sons programmés, même si elle concède à revenir de temps à autre au clavier, elle peut incarner ses chansons – au sens proprement étymologique, « embody » mot encore plus explicite en anglais. Le corps exulte, s’exalte, ce corps dont il est si souvent question dans ses chansons. Un corps de femme qui fut aussi celui d’une petite fille à qui, un jour un père a dit « ma fille, les hommes, tu sais, c’est pas c’que tu crois… » Ah oui, on sait bien ce que l’on dit aux filles… On sait bien à quoi on pense quand on les regarde grandir… On sait bien quel est ce point précis où convergeront les regards… Aussi Karina ose une chanson portant le titre Entre mes jambes… De l’érotisme certes, du désir, des « cris, des chuchotements »… mais aussi « des barbelés, et puis des lames de rasoir… »
Elle souligne aussi que nous n’avons d’existence que dans le regard de l’autre… Sinon on meurt, ou bien on tue, on taille en pièces… Et en matière d’amour mortifère elle y va franchement ! Karina chante cette dimension là, jusqu’à la folie, la déraison… D’où l’urgence de rappeler « Ce que j’étais belle quand tu me voyais » et toutes ces « enluminures » dont on s’habille, tous ces bluffs… Alors qu’il suffirait juste de savoir « goûter la couleur de l’aventure »… ou de rentrer chez soi au bout, tout au bout du chemin à « chercher des sirènes … le cœur tout de guingois ».
Un corps qui se libère, se donne aux sons, les accompagnent, amplifiant les effets d’une voix grave et ample, capable de toutes les nuances. Du murmure, de la tendresse, aux cris violents Karina Duhamel semble vouloir aller au bout de ses messages, tout au bout de l’émotion à partager. Pas question de compromis, de petits arrangements, de demi-mesure. Elle danse, elle chorégraphie ses messages, ses bras et ses mains offrent eux aussi leur langage… Et c’est ce corps en mouvement, cette connivence avec les musiciens qui nous emportent dans une atmosphère résolument électro rock où parfois la guitare se met à rugir furieusement… Une diablesse doublée d’une rockeuse, cette Karina !
Alors, en contre point de ces exubérances, de cette atmosphère baroque, quand elle s’en vient s’assoir en bord de scène, on reste captif de sa douceur … Sur le ton de la confidence, elle se met à fredonner une chanson d’autrefois, du temps du regard amoureux de son père posé sur sa mère chantant – un regard qui restera à jamais dans sa mémoire – « ll y avait des chansons des chansons /Les hommes venaient y boire et rêver /dans la maison sur le port où les filles riaient fort… » Allez savoir, c’est peut-être enquête de ce regard là qu’elle chante… Transmission maternelle aussi cette pensée répétée « C’est dur, il faut bien le dire, de penser qu’il faudra mourir un jour… » On écoute aussi avec attendrissement Almeria, ville d’Andalousie, décor de cinéma où plane le souvenir de Sergio Léone… Karina joue avec le vêtement qui l’enveloppe, comme avec une jupe de gitane « Depuis le temps que je te rêve mon pays perdu … » où dansent les filles aux pieds nus… Et que dire de la chanson, une berceuse, offerte à Barbara Weldens, à cette petite sœur qui lui ressemblait tellement « Dors… bienvenue dans la nuit /Les vivants souffleront tes braises … » ? Karina se fait alors immobile et délicate, fragile soudain… On aime son interprétation de la vieille chanteuse réaliste, imitation bouleversante où l’on découvre encore une autre voix, un autre corps, comme fatigué, usé, « J’ai le dos qui se barre en sucette /Les seins qui tombent et la vue basse /Les cheveux blancs, d’puis belle-lurette /On m’dit bonne à foutre à la casse »…mais qui s’ouvre sur une autre déclaration d’amour « Je chante pour toi sans un clou /Mais tout ça, on s’en fout /C’est l’amour qui remplit ma voix… » On est bien prêt de penser qu’il s’agit là d’un credo. Son credo ?