Thomas Pitiot, Allez jouer dehors - Balakissa (© Eloïse Scouardec)

Tho­mas Pitiot, Allez jouer dehors – Bala­kis­sa (© Eloïse Scouardec)

6 juillet 2017 – Fes­ti­val Pause Guitare

Tho­mas Pitiot – Spec­tacle jeune public : Allez jouer dehors

Avec Tho­mas Pitiot (gui­tare, chant), Michel Kanu­ty (cla­viers), Yvan Des­camps (per­cus­sions)


L’A­tha­nor – Albi (Tarn)

Pause Gui­tare, c’est le fes­ti­val d’Occitanie qui réus­sit un petit miracle : une pro­gram­ma­tion inter­na­tio­nale avec des noms pres­ti­gieux – jugez-en, ZZ Top, Renaud, Sal­va­tore Ada­mo, Radio Elvis, Les Insus, M. Poko­ra, Chris­tophe Maé, Oli­via Ruiz, Sopra­no, Vincent Delerm, Cocoon… Des scènes « décou­vertes » dont une vitrine pour les artistes d’outre-Atlantique. Des scènes gra­tuites, un ate­lier d’écriture – slam… Et sur­tout, sur­tout une convi­via­li­té exem­plaire qui n’est à ce jour jamais négli­gée mal­gré des chiffres à la hausse : 950 béné­voles, 65 000 fes­ti­va­liers atten­dus, 200 tech­ni­ciens et tout autant de res­pon­sables de la sécu­ri­té et de la pro­tec­tion civile. Pause Gui­tare et l’association orga­ni­sa­trice Arpèges et Tré­mo­los ont réus­si à gagner la confiance de 45 spon­sors ou mécènes en plus des par­te­naires ins­ti­tu­tion­nels, ce qui explique sûre­ment son déve­lop­pe­ment. C’est un gage ras­su­rant de pérennité.

Aujourd’hui, au cœur de la ville d’Albi qui vit au rythme du fes­ti­val pen­dant six jours, c’est aux très jeunes spec­ta­teurs que s’adresse le trio qui les invite à les rejoindre et leur dit « Allez jouer dehors ! ». Bien enten­du c’est dans la tête que tout se passe ! On n’apprend jamais trop tôt le pou­voir du spec­tacle vivant, sa force d’attraction, d’illusion ! Or Tho­mas Pitiot est un illu­sion­niste, un vrai. Avec ses chan­sons il nous fait croire, à nous « les grands », que les murs se couvrent de cou­leurs, que « Des p’tits soleils jaunes appa­raissent un peu par­tout » et irré­sis­ti­ble­ment d’ailleurs on se met à dan­ser. Suf­fit d’écouter ses musiques qui vous enso­leillent le cœur, celles qui s’inspirent des conti­nents, des pays où le rythme vous vient en nais­sant, pour sen­tir ses pieds s’agiter… Une envie sou­daine de zou­ker… Si, si, je vous jure ! Michel Kanu­ty aux cla­viers et Yvan Des­camps à la bat­te­rie et aux per­cus­sions, ajoutent à la gui­tare de Tho­mas toute une pano­plie de sons enso­leillés. À l’occasion ils se prêtent aus­si à quelques facé­ties comme dans la chan­son paci­fiste Mieux à faire où leurs casques de sol­dats rap­pellent ceux de l’inoubliable duo Bour­vil /​Louis de Funès dans La Grande Vadrouille… On rit et on aime cette invi­ta­tion à aimer la vie, le ciné­ma, la lec­ture, la pis­cine, la pati­noire : « Ne comp­tez pas sur nous pour faire la guerre /​Ne comp­tez pas sur nous on a mieux à faire ».

Bien enten­du on n’est pas éton­né que ce der­nier disque, comme ce der­nier spec­tacle créé en février 2016, soit des­ti­né aux plus jeunes, ceux qui sont au plus près du rêve, de l’imaginaire. Ceux qui, au quart de tour, s’embarquent dans les contes, les his­toires même – et sur­tout ! – si elles ne tiennent pas debout comme ces ani­maux qui parlent ver­lan… Exer­cez-vous, grands enfants que vous êtes ! Qui c’est qui fait « Oumia, oumia ? Uic-uic ? Foua Foua ? »

On savait Tho­mas Pitiot inves­ti dans des ate­liers, dans son dépar­te­ment de Seine-Saint-Denis, mais ailleurs aus­si, comme dans l’école de Haute-Marne, à Esnou­veaux exac­te­ment, où naquit le titre A c’qui paraît, une chan­son où le col­lège devient le sujet de toutes les angoisses, de tous les fan­tasmes : « Y a tout qui change, tout qui s’mélange… » On le sait bien, l’entrée en sixième, l’entrée au col­lège, « c’est autre part, ça fait bizarre »… Il se pour­rait bien, mal­gré tout, que toutes les rumeurs véhi­cu­lées par les plus grands aient une part non négli­geable de vérité.

Le plus sou­vent c’est avec sa propre his­toire – ou ce que l’on en devine – que Tho­mas Pitiot écrit, pour les adultes comme pour les plus jeunes. Et cette his­toire-là, qui est la sienne, offre de belles ren­contres. Se des­sinent alors quelques por­traits, quelques évo­ca­tions déli­cieu­se­ment, ten­dre­ment pit­to­resques : la cou­sine qui joue au foot bien mieux que les gar­çons, gagne aux billes, grimpe plus haut aux arbres, crie plus fort – une chan­son fémi­niste par­ti­cu­liè­re­ment effi­cace ! – Paco Koné et sa col­lec­tion de cha­peaux « para­ton­nerres » capables de pro­té­ger des sor­cières, des misères. Mamie Jea­nine et ses bisous dans l’oreille. Et puis Bala­kis­sa, fille de Bal­las­ki et de Kamis­sa, qui fait du ski à Bama­ko… grâce au chan­ge­ment cli­ma­tique qui fait un peu n’importe quoi ! Quant à la petite Ber­tille, il vous fau­dra ache­ter l’album pour décou­vrir tous les jolis noms d’amour qui riment avec son pré­nom… Mais elle n’est jamais aus­si gen­tille que lorsqu’elle dort. Comme tous les enfants en somme.

Voi­là qu’avec les chan­sons de Tho­mas Pitiot, on n’a plus peur de rien, même pas des filles qui ne nous aiment pas, même pas des voleurs, même pas des chiens méchants ! On n’a plus peur d’avaler des noyaux de cerise, d’abricot, d’avocat, ou d’olives… ni même un che­wing-gum… On n’a plus peur des autres, de l’autre… Car on est tous dans la même classe, la classe de Tho­mas. Tous dans son car­na­val « qui pas­se­ra bien­tôt au coin de ta rue » !