Alcaz– Portés par les vents - 2018 (©Vyviane Cayol- Karine Girault)

Alcaz– Por­tés par les vents – 2018 (©Vyviane Cayol- Karine Girault)

12 février 2018 – Alcaz, 6ème album 

Por­tés par les vents, paroles et musiques de Vyviane Cayol et Jean-Yves Liévaux

Avec

Vyviane Cayol (Voix, gui­tares, mélo­di­ca, har­mo­ni­ca, cazou, chœurs) Jean-Yves Lié­vaux (Voix, gui­tares, chœurs) Théo Groz­da­nic (gui­tares, pro­gram­ma­tions bat­te­rie /​percussions, chœurs) Lucas Man­na­ri­no (Gui­tares, basses, pro­gram­ma­tions bat­te­rie /​per­cus­sions, chœurs) Robin Dus­sau­choy (vio­lons) Chris­tophe Mora (trom­pettes)


Plon­ger le regard dans tout ce bleu, s’y perdre le temps d’écouter cet album Por­tés par les vents.

Ce bleu c’est celui de la palette de Vyviane Cayol, artiste peintre aus­si. Ce bleu c’est sans aucun doute la cou­leur fétiche de ce duo qui contre vents et marées, mal­gré les heures « mal embar­qué, mal­me­né », mal­gré les jours qui tanguent, chante pour « que l’on sème autre chose que la haine ». Nous connais­sons leur désir effré­né de col­ler à la vie qui va, même si elle va trop vite, même si elle cogne et fait mal et de res­ter Les yeux dans les yeux. Leur duo est un duo d’amour et ils entendent le faire savoir, répandre la bonne nou­velle. Encore, tou­jours, « chan­ter si fort que la mort se déchire ». Chez eux à Mar­seille, sur les routes de France mais aus­si au Qué­bec, leur deuxième patrie où ils ont tra­cé leur route chan­son­nière depuis une dou­zaine d’années. C’est, on l’imagine, ce que signi­fie leur por­trait joyeux, far­ceur, sur la pochette de l’album même si on aurait aimé voir le bleu de la palette s’exprimer seul … Le bleu du ciel, le bleu des flots. Comme au ver­so avec juste le rouge de la gui­tare élec­trique qui émerge en filigrane.

Cet album sur­prend à la pre­mière écoute, habi­tués que nous sommes au son folk, à leurs deux gui­tares et au tam­bou­rin posé sur les genoux de Vyviane… Car dans ce nou­vel opus, ils ont été cueillir des sons élec­tro, la dou­ceur d’un vio­lon, les accents lan­gou­reux de la trom­pette… Le tout se mêle pour don­ner à chaque chan­son sa cou­leur. Tan­tôt élec­tro-rock, tan­tôt pop, tan­tôt lati­no ou jazz manouche. Par­fois l’orchestration pour­rait être celle d’un long métrage, des images pro­je­tées de grands espaces marins, des orages, des ciels de pluie ou de paix infi­nie comme dans les deux mor­ceaux épo­nymes, en début et en fin d’album. Un tra­vail de stu­dio dont on ima­gine la rigueur et l’exigence avec, au fond de nous, la ques­tion de ce que ces sons devien­dront en scène.

Pour l’heure, il s‘agit d’écouter l’album et d’en suivre le fil, d’en suivre le vent qui souffle en fin de mor­ceau. Les chan­sons écrites dans leur grande majo­ri­té par Jean-Yves Lié­vaux, sont incon­tes­ta­ble­ment ins­pi­rés par l’immensité, le ciel, la mer, les vents. Leur souffle lyrique se veut uni­ver­sel même si le duo redit à l’envi leur force d’aimer, de s’aimer comme dans « un joli mois de mai », ce To day te dire, où les gui­tares en har­mo­nie se font sen­suelles. Il ne fau­drait pour­tant pas ima­gi­ner que le duo Alcaz fait fi des dou­leurs, des aspé­ri­tés de ce monde, de « l’errance des empires ». Il chante aus­si L’eau des larmes, chan­son qui s’est nour­rie des comp­tines fami­lières. Notre nature humaine faite de « secrets d’encre noire et de craie », tan­tôt « fée cara­bosse », tan­tôt « prince du désert ». On a si Mal au vent, on a « per­du le nord, per­du le sens » quand l’autre, celui, celle qu’on aimait tant, s’en est allé‑e … « Mal au cœur, éphé­mère /​Pétales de cendre sur la mer. »

C’est dans ce registre de la dou­leur, de l’angoisse que l’on trouve un titre sai­sis­sant – sans doute notre pré­fé­rence – une mise en musique, en chant, des vers de Bau­de­laire Spleen où se mêlent quelques vers de Jean-Yves Lié­vaux. Vents et flots amers se déchaînent avec gui­tares et bat­te­rie, avant que tout s’achève dans un souffle hale­tant et ces mots chan­tés par Vyviane : « On regar­dait les vents qui tour­naient sur la mer /​Il pleu­vait fort. »

Le duo, il est vrai, ne manque pas d’efficacité quand il chante la liber­té, clin d’œil appuyé à Georges Mous­ta­ki (Free­dom Liber­tad) dans la sobrié­té d’une gui­tare folk et de l’harmonica… Quand il voue la fin de l’album au retour à la séré­ni­té, à la dou­ceur, quand il en appelle au vent léger d’une vie simple dans L’île d’en face. Echo au début de l’album, pro­messe de bon­heur, par delà l’éloignement : « Pour les oiseaux bleus et le ciel doré/​Les cigales qui four­millent et se moquent de l’heure/ Les bat­te­ments de cils des papillons en fleur /​Com­men­cer la jour­née par remer­cier /​Quel temps d’avril »