Le Larron (© Claude Fèvre)
2 octobre 2015 – Le Larron en trio
Avec Le Larron, David Caroll (guitare, basse) et Paul Magne (batterie, platine).
Le Bijou (Toulouse)
Entendons-nous, si Le Larron franchit le mur du son, ce n’est pas pour dire qu’il monte trop le son. Non, c’est pour dire que cette fois la chanson s’en va sur des terrains inhabituels, du moins dans une petite salle comme celle du Bijou. Le Larron a convoqué ce soir toute une instrumentation électronique, lui-même rivé à ses claviers, écrans… Des branchements en veux-tu, en voilà… On imagine la complexité de tous ces réglages, à la grande joie du jeune Dorian, technicien à la sonorisation, que le défi a visiblement enchanté.
Ce préambule ne vous dit pas grand-chose du rendu. C’est là que les mots ont leurs limites, avouons. Pourtant je ne voudrais pas être infidèle au ressenti. Dans une atmosphère très rock, de l’émotion nous en avons eue. De sa voix singulière, entre Arthur H et Charlélie Couture, (c’est juste pour dire qu’elle ne laisse pas indifférent) il frappe même très fort le brigand ! Il ne manque ni d’audace, ni de tendresse. Même s’il faut vraiment être attentif pour déceler sous le flot de mots arides un peu d’espoir. Au fond, c’est sa chanson touchante de jeune papa s’adressant à son enfant qui pourrait tout résumer : « La vie est tellement belle, mais dure. » Et disons-le, c’est plutôt sur ce qui va mal et fait mal qu’il s’attarde, particulièrement en amour qui ne résiste pas à l’usure du temps. De ce côté-là, guère de solution, sinon dans cette petite mort, le silence… à moins que l’on ne s’obstine à répéter Je t’aime, moi je t’aime… et j’veux que tu m’aimes… Qui sait si à force d’obstination ?
Quelques chansons qu’il annonce d’un ton léger – faut bien détendre un peu l’atmosphère – vont même titiller notre actualité politique, « T’as dit qu’tu ferais ci, qu’tu ferais ça, mais t’as rien fait du tout » – de qui peut-il donc être question ? – ou bien « J’ai des aïeux pour tous les goûts », efficace réponse au racisme ordinaire qui maintenant s’affiche sans vergogne. Et, finalement, c’est un poème de Victor Hugo (Le Labyrinthe) qui dit la vérité : « Les opprimés feront plus tard des oppresseurs. » Depuis plus d’un siècle et demi, hélas, rien de bien nouveau sous le soleil.
Quand les trois musiciens viennent en bord de scène pour clore leur concert, on se prend à regretter qu’ils ne l’aient pas fait avant. Ce mur de sons présenterait-il finalement trop d’intensité en continu ? On aurait besoin de respirations, de pauses. Mais on s’entend déjà reprocher nos goûts surannés.
Ici Le Larron et ses musiciens en appellent avec brio aux trouvailles infinies de la programmation. La Chanson va s’enrichir de plus en plus de ces recherches-là. C’est certain. Le concert de ce soir en donne un avant-goût.