Télégram, 1er album (© Pierre Wetzel)

Télé­gram, 1er album (©Pierre Wetzel)

23 septembre 2016 – Télégram – sortie du 1er album

avec Laurent Kebous et Vincent Ser­ra­no des Hur­le­ment d’Léo , Chloé Legrand de La Cafe­te­ra Roja et Julien Per­ugi­ni de Damage Case !

Une année seule­ment pour en arri­ver à cet album qui offre des tra­ver­sées dans tant de pay­sages ! On note­ra que le groupe nait quelque part en Aqui­taine, du côté de Libourne, dans une com­mune qui orga­nise depuis dix ans un évè­ne­ment pour les musiques ampli­fiées, Festiv’Arques. C’est auprès de Voix du Sud qu’il com­pose ses pre­miers titres. Et quelques salles bien ins­pi­rées lui offrent ses pre­miers concerts (La Mau­vaise Herbe à Sou­bise en Cha­rente) sa pre­mière rési­dence scé­nique (Le Roxanne à Ber­ge­rac en Dor­dogne). Ce maillage de lieux, d’énergies, de pas­sions qui sauvent la dif­fu­sion de la musique dans bien des cas !

Dans ce pre­mier album, dont la pochette car­ton­née, cou­leur bis, évoque des temps enfuis, s’invitent – excu­sez du peu ! – l’ombre de Serge Gains­bourg mais aus­si de Leo­nard Cohen. Avec ces deux noms tout pour­rait être dit.

Rien d’étonnant à tout cela si l’on regarde la com­po­si­tion du groupe où se croisent d’abord des expé­riences dans d’autres for­ma­tions. Ce qui les réunit bien enten­du ce sont leurs uni­vers musi­caux où l’on est tou­chée vrai­ment de décou­vrir en fin d’album que le nom du groupe, Télé­gram, n’est pas fran­che­ment par­ler anglo-saxon puisqu’il est emprun­té à Serge Gains­bourg. On sou­li­gne­ra l’originalité de leur re-créa­tion de la chan­son triste, du temps des Mau­vaises nou­velles des étoiles : Over­seas Tele­gram. Des par­ti­ci­pa­tions sont signi­fiantes : la voix de Meliss­mell, les gui­tares de Napo Rome­ro, la bat­te­rie de Nico des Hur­le­ments d’Léo, la plume d’Erwan Naour de Wallace… 

On avoue une légère sen­sa­tion d’être cha­hu­tée, bous­cu­lée devant ce patch­work, cette mosaïque d’influences. Et c’est au final extrê­me­ment plai­sant. On enten­drait même reve­nir David Bowie dans la voix de Kebous notam­ment dans Open my eyes. Il faut vous dire que cet album mélange non seule­ment les genres – le groupe lui-même parle de punk-rock (Ornières), de blues his­pa­nique (L’enclume des Jours où s’invite la voix de Meliss­mell), de coun­try folk (LAddic­tion) – mais aus­si les langues. Sur douze titres trois sont en anglais, et un slam en alle­mand vient se mêler aux mots de Leo­nard Cohen dans I’m your man.

Pour carac­té­ri­ser ce tra­vail d’emprunts et de créa­tion mêlés on peut s’arrêter au titre Tain­ted love où se sont ins­crits avant eux les noms de Glo­ria Jones, Soft Cell, Mary­lin Man­son. Tele­gram intro­duit ce mor­ceau avec un vio­lon­celle et dans ce qu’il nomme un « cres­cen­do embal­lant » il ajoute un saxo­phone bary­ton… Ce groupe est baroque, on vous le redit ! Alors dif­fi­cile de rendre compte de cette pro­fu­sion de détails musi­caux. Citons que Vincent Ser­ra­no a lui seul joue vio­lon, oud, steel gui­tar, kora…

On ne sau­rait trop conseiller de pro­fi­ter de leurs clips par­ti­cu­liè­re­ment réus­sis pour décou­vrir les trois pre­miers titres de l’album. D’abord Hou­ma­ma, réa­li­sé par Pierre Lebret : un long tra­vel­ling, un road movie au volant d’une vieille Mer­cé­dès des années 70 où appa­raissent en fili­grane, dans un pay­sage très aqui­tain, des images de révolte, des por­traits… Cabu, Cavan­na, Gains­bourg, Coluche, Bras­sens… Simone Weil, les Femen, Louise Michel… « Mes plaies, mes bosses » dit le texte mais aus­si « Nos révoltes à nous Pablo »… On aura com­pris : les textes ne se conten­te­ront pas de dérou­ler sans fin l’intime pay­sage, le spleen d’un homme fati­gué de ce monde. Le deuxième clip est plus élo­quent encore. Il s‘agit d’un emprunt aux séries des Silly Sym­pho­nies de Dis­ney : Just dogs (1932) où appa­raît pour la pre­mière fois Plu­to en héros … plus sûre­ment anti-héros… Une his­toire de chiens en cage qu’un petit congé­nère intel­li­gent et géné­reux, libère tous, tel Robin des Bois, quand son com­pa­gnon de cel­lule, Plu­to, ne pense qu’à lui ! Le texte de Kebous, Moins qu’un chien, mérite par­ti­cu­liè­re­ment le détour par les temps qui courent : « En meute est notre ave­nir, ils n’ont rien vu venir »… Dans le troi­sième clip, pour por­ter le texte de L’Amour à vif et son ambiance coun­try, Antoine Mor­toire crée des images ins­pi­rées du wes­tern, façon Ennio Mor­ri­cone – gros plans sur les regards, sur les bot­tines, sur les mains des musi­ciens, sur les che­vaux – où s’illustrent au ralen­ti une belle vol­ti­geuse équestre vêtue de blanc… L’amour à mort /​L’amour à vie /​L’amour à vif

On retien­dra de ce quar­tet avant tout le goût du par­tage, des ren­contres, des voyages inso­lites comme le démontre leur par­tage du spec­tacle avec le col­lec­tif équestre Azur Ban­gor, dans leur éton­nant « Bar-tabac ».