Yvan Cujious, Le Bijou, Toulouse, 5 avril 2012
Il vend du vent, Yvan Cujious, et dans son précédent spectacle il le chantait même comme une profession de foi… Alors, ce serait du presque rien, du pas grand-chose ? Détrompez-vous car ce vent là fait un bien fou, comme un air léger, juste ce qu’il faut pour que votre embarcation glisse sur les flots… Vous voyez ? Ou plutôt vous le sentez cet air là, « sans rien en lui qui pèse ou qui pose » ? Bien sûr, je les entends les bougons, les tristes et les grincheux, ceux qui veulent que la « bonne » chanson grince, dérange, bouscule.
Il pousse la chansonnette Yvan, c’est ça ? Hé bien oui, il la pousse et plutôt bien, avec son inimitable accent d’ailleurs, comme hier soir dans la petite salle du Bijou où s’était donné rendez-vous un public de tous les âges emporté dans le rythme dès la première chanson : L’amour ça te met dans tous tes états et ça nous donne envie d’en rire ! C’est le premier titre du nouvel album et si les médias n’étaient pas si étrangers au monde de la chanson ils en feraient immédiatement le tube de l’été. Une mélodie qui s’entête et vous accompagne jusqu’au réveil, un refrain savoureux, ça ne trompe pas ! D’ailleurs le ton a été donné d’emblée avec la projection d’une vidéo qui fait office d’entrée en matière : ce sera joyeux, festif, enjoué et Yvan endosse le costume, la gestuelle, les mimiques de son personnage clownesque, pour ne plus s’en départir, aidé par ses musiciens : Florent Hortal, à la guitare, le plus ancien à ses côtés dont il fait volontiers son souffre-douleur, avec la complicité des deux autres que sont Rémi Bouyssière aux contrebasse et guitare et Jean-Pierre Savoldelli aux batterie et percussions.
Le thème de prédilection d’Yvan reste l’amour, sans doute, mais il se plaît à le décliner de bien originale façon et c’est précisément ce que nous demandons à la chanson. Citons son inoubliable amour vinicole pour la belle Margaux qui ne veut pas être aimée pour son cru, la rupture et la liquidation de communauté… d’un rein, ses amours à la chaîne qu’il s’en va voir à vélo, et tous ces petits défauts qui gâchent la vie à deux dans Finie la poésie… Mais le chanteur fantaisiste sait aussi émouvoir et même s’il ne s’attarde pas dans ce registre, il fait mouche comme dans cette évocation d’un bambin, « On a tellement besoin de chansons quand il paraît qu’on a 10 ans », accompagné alors seulement par la guitare acoustique ou bien dans cette image comique des vieilles qui tricotent sur leur banc en papotant, taillant « des costumes plus ou moins grands », et qui glisse au fil du texte vers celle, troublante, d’un homme qui « se voûte comme un croissant. »
Ce soir on affiche complet : Yvan Cujious sera à nouveau au Bijou pour un ultime rendez-vous avec son public toulousain fêtant la sortie de son nouvel album, J’aime tous les gens. Je suis prête à parier que le public finira debout, acclamant le trublion, l’artiste, quittant la scène dans une déambulation jazzy, digne de la Nouvelle Orléans. Et c’est aussi l’occasion de dire que ce concert donne furieusement l’envie de danser !
Le public quitte la salle avec le sourire. Il est heureux, ça se voit. Yvan vend du vent dans ses chansons, il vend du bonheur aux gens. Et s’ils achètent son album où quelques complices, non des moindres, ont mis leur grain de sel (Magyd Cherfi, Art Mengo, Jérémy Dirat, Antoine Salher, Cédric Antonelli) ils auront le privilège de découvrir en sus quelques perles comme La Boîte aux lettres, clin d’œil appuyé à nos échanges virtuels, ou Au Sénégal, enfin une solution aux maux d’amour… prendre l’avion, le large avec le bon vent d’Yvan !