Camille BAZBAZ @Sourdoreille.net

Camille BAZBAZ  (© Sour​do​reille​.net)

31 janvier 2017 – 16ème Détours de Chant – Camille BAZBAZ en duo Tour

avec Camille Baz­baz (Pia­no Fen­der Rhodes, voix) et Fabrice Colom­ba­ni (Per­cus­sions, voix-direc­teur musi­cal du live band De La Soul)

Le Bijou (Toulouse)

Réjouis­sons-nous ! Le Bijou est pris d’assaut pour deux soi­rées d’exception, qui feront date, à n’en pas dou­ter dans l’histoire du fes­ti­val Détours de Chant et celle de cette salle inti­miste. Avant le concert, des spec­ta­teurs à nos côtés s’étonnent d’avoir le pri­vi­lège de voir, là, sur cette petite scène, à un mètre d’eux, Camille Baz­baz.  L’un de ces artistes que notre ima­gi­naire rend inac­ces­sible, relègue dans un monde de paillettes, un entre deux. Pas vrai­ment réels ces êtres là.

Le voi­ci, sous une ova­tion, dans son cos­tume rose, che­mise blanche, pan­ta­lon mou­lant, che­veux poivre et sel ébou­rif­fés, barbe hir­sute… Un mélange de décon­trac­tion et de raf­fi­ne­ment. C’est comme une appa­ri­tion pour la plu­part de ceux qui l’attendent et qui vont dès les pre­mières notes frap­per dans leurs mains, crier leur enthou­siasme. Une ambiance « de ouf » pour par­ler la langue d’aujourd’hui. C’est vrai qu’immédiatement sa voix fami­lière nous fait faire des sauts en arrière. Et c’est bon ! Indé­fi­nis­sable pou­voir des chan­sons qui tissent le pay­sage sonore de nos vies.

Baz­baz, sou­dai­ne­ment sor­ti de notre écran de télé­vi­sion, annonce « une chan­son douce dans un monde de brutes » et le son de son Fen­der Rhodes s’élève. Cet ins­tru­ment fait aus­si son office pour nous trans­por­ter loin dans nos mémoires, dans les années soixante dix pour les plus âgés. Voi­ci ce qu’il en dit lui-même à Valé­rie Lehoux dans un entre­tien pour Télé­ra­ma, il ya dix ans : « Fen­der Rhodes, la marque de mon cla­vier, qui date des années 1970 et qui doit peser 73 kg ! C’est moi qui le porte après les concerts… quand je ne suis pas trop saoul ! J’ai besoin d’un ins­tru­ment réac­tif et solide, qui résiste à mes assauts. J’aime le côté phy­sique de la musique. Sur scène, il y a tou­jours une tension.”

Et voi­là que tout est dit ou presque sur l’homme de scène, véri­table show man. Il s’empare gou­lu­ment de la scène. Il en fait un espace de jeux et de réjouis­sances col­lec­tifs. A la fin du concert sa che­mise blanche est bonne à tordre. Son pied droit ne cesse de frap­per une planche où est posé un tam­bou­rin, comme pour faire écho aux bat­te­ments de son cœur de « lover », éter­nel­le­ment ravi, émer­veillé, atten­tif à tous les méandres du sen­ti­ment amou­reux. La pochette de son der­nier album Baz­baz Café où s’affiche un bai­ser, sur la ban­quette d’un bar, dit l’essentiel. Comme un cre­do de l’ar­tiste. Pré­ser­ver son désir : « Ma mai­son c’est dans tes bras, c’est quand tu me dis tout bas, comme une confes­sion, aime –moi sans façon… » S’embrasser comme si c’était la der­nière fois, gar­der « Sur le bout de la langue, ton petit cœur qui tangue. » Aimer comme on pré­pare un mets suc­cu­lent : « Je t’ai fait de l’amour à man­ger avec les doigts… » Mais, on le sait tous, amour rime aus­si avec doute, avec dou­leur quand la porte claque et que l’on se sent « mau­dit », quand l’autre est loin et que l’on « s’écroule », quand on ne trouve plus le « groove », et que « ça sent la loose »… Baz­baz n’en finit pas de faire le tour de l’amour.

Ce concert c’est une fête et d’ailleurs il le dit, confi­den­tiel : « J’ai envie de faire le con et en même temps d’assurer ». Et il assure, croyez le ! Il n’a rien lâché des années rock de ses débuts avec son groupe Le cri de la mouche, rien oublié de toutes ces ren­contres et par­tages qui l’ont tra­ver­sé de part en part : soul, reg­gae, blues. Sans par­ler du ciné­ma, « ma troi­sième pas­sion, dit-il, après la musique… et les femmes ! »

Ce concert est aus­si – et sur­tout ?- ins­tru­men­tal. De larges plages en effet sont accor­dées au cla­vier et aux per­cus­sions. Car on ne sau­rait aller plus loin dans l’évocation de ce moment de joie par­ta­gée sans évo­quer le per­cus­sion­niste d’exception qui l’accompagne, son pote cubain, Fabrice Colom­ba­ni dont le par­cours fait envie : Phoe­nix, ‑M-, Sebas­tien Tel­lier, Bri­gitte, Zeb­da, Alain Bashung, et tant d’autres… Avant de deve­nir en 2012 direc­teur musi­cal du live band de De La Soul. Excu­sez du peu…

On avoue­ra avoir pris un plai­sir sin­gu­lier à voir et entendre ce per­cus­sion­niste afro-cubain. Une invi­ta­tion au rythme, à la danse… A la joie de vivre quand Baz­baz, lui, en joyeux épi­cu­rien, nous invite à aimer, dans tous les sens du mot.

Après le concert, on découvre un homme heu­reux, sim­ple­ment heu­reux d’avoir été là avec nous. Baz­baz, che­veux ren­trés sous sa cas­quette, sort alors de notre écran de télé­vi­sion, de notre poste de radio, et nous rejoint dans la « vraie vie ». Il prend le temps de par­ta­ger un ins­tant. Authen­tique, cha­leu­reux. C’est aus­si ça, le bon­heur accor­dé par une petite salle.