Chroniques lycéennes 2017 (© Solen Henry)
25 avril 2017 – Prix Charles Cros lycéen de la nouvelle chanson francophone
Dernière séance des ateliers d’écriture
Avec les élèves de seconde 203 et 208, leur professeur de français et de documentation
Lycée Henri Matisse de Cugnaux (Haute-Garonne)
Le projet s’adresse à tous les élèves de lycée d’enseignement général ou professionnel scolarisés en France ou à l’étranger, ainsi qu’aux détenus scolarisés de niveau lycée des centres pénitenciers.
À partir d’une sélection de 18 à 20 titres de la nouvelle chanson francophone, réunis sur un CD, les lycéens, accompagnés de leurs enseignants, sont invités à proposer des chroniques ou critiques musicales.
Une sélection effectuée tout au long de l’année scolaire permet de retenir les textes les plus pertinents pour une publication sur le site de l’opération. Ces chroniques lycéennes côtoient ainsi des articles provenant de la rédaction de Télérama ayant trait aux mêmes artistes…
En fin d’année scolaire, les lycéens votent pour les chansons, qui ont été, pour eux, les plus belles découvertes ; le Prix Charles Cros des lycéens est alors remis à trois artistes et clôture ainsi l’opération.
Ils ont quinze ans, la vie devant eux, des sons à ne plus savoir qu’en faire dans les oreilles. Ils sont élèves en classe de seconde au lycée de Cugnaux, au Sud de Toulouse. Ils se prénomment Pierre, Coralie, Juliette, Théa, Levy, Farha, Dylan… Ils sont joyeux, volontiers blagueurs, mais attentifs aux consignes, désireux de répondre à notre attente.
Dix fois dans l’année, ils sont venus par demi-groupes, au Centre de documentation accompagnés de leur professeur de français, sur l’invitation de Pascal, professeur documentaliste stagiaire, féru de Chanson, faut-il le préciser. Nous voici embarqués, quatre « animateurs » novices – c’est une première pour nous tous ! – dans un atelier d’écriture singulier.
Une aventure pédagogique, culturelle, humaine surtout.
C’est pour nous l’occasion de rappeler l’action de l’Académie Charles Cros qui se mobilise pour atteindre un public quasiment étranger à la Chanson. À l’heure de la publication des chroniques, nous en sommes aussi à l’heure du bilan de notre travail. Bien entendu, dès le départ, les adolescents n’avaient pas manqué de se montrer catégoriques, parfois, on le devine, par simple provocation. On soulignera que ce sont bien entendu les plus hardis qui s’expriment, ceux qui aiment bien qu’on les remarque d’emblée !… Rien de bien nouveau sous le ciel d’un lycée ! « Ces chansons ne nous parlent pas du tout ». « Ce n’est pas du tout ce que nous écoutons habituellement ». Peu à peu pourtant nous allons les voir s’attacher à ce rendez-vous, s’y consacrer avec intérêt, ne pas montrer de lassitude et finalement nous exprimer qu’ils ont aimé cette découverte. De là à se rendre d’eux-mêmes en concert… C’est une autre affaire ! D’où l’importance d’associer ces ateliers d’écriture à des temps de rencontre avec des artistes.
Notre objectif avoué sera de leur permettre d’exprimer leur avis, leur point de vue et pour cela on leur conseille de s’abstraire le plus possible de toutes les informations données en abondance (beaucoup trop !) sur le site même des Chroniques. Il est si tentant de se noyer dans les détails biographiques, de faire un simple montage, un « copier/coller » !
Ce qui est d’emblée posé comme postulat c’est que ces séances ne donneront pas lieu à une évaluation chiffrée. Nous voici donc en marge, presque en dissonance, dans un système qui repose, en tout, tout le temps, sur la sacro-sainte notation. Nous voici dans un espace dédié à l’écoute, l’expression d’émotions, de sensations. Un espace de liberté.
Soulignons que les professeurs de français ont eu cette bonne idée de donner deux heures de leur programme à une activité ludique et créatrice qui pourtant n’a pas manqué de confronter leurs élèves à des questions de lecture et d’écriture. Chacun a choisi librement sa chanson pour la mélodie et les arrangements dans un premier temps, ensuite pour le message délivré par les paroles qu’il leur a fallu regarder de près. Ils ont dû se poser la question de l’énonciation de leur texte – je, nous, on ? – la question de l’accroche, de sa chute, de l’expression de leurs sensations, de leur compréhension de la chanson… Bref, ils ont sûrement appris beaucoup, surtout les élèves les plus démunis, ou les plus réservés. Certains ont même offert quelques bonnes surprises à leur professeur.
On peut simplement relever qu’au moment de réécouter les chansons, en fin de séquence, nombreux étaient ceux qui chantonnaient, qui connaissaient par cœur les chansons, preuve qu’ils se sont laissé séduire.
Leur hit-parade le voici : en tête Afro-Picard de Toma Sidibé – belle illustration de leur attachement au métissage ! – puis J’suis pas dupe de Pomme (essentiellement choisie par les filles !), Mes échecs par Hippocampe fou dont ils ont commenté à l’envi la métaphore filée du jeu d’échecs et de l’aventure amoureuse, enfin La pêche au bonheur de Chloé Lacan. Notons qu’elle a séduit les garçons comme les filles avec son rythme, sa cadence et son invitation à prendre sa pelle et son seau pour aller de l’avant, sans avoir peur de « prendre un râteau » !
Au final ils ont même été force de propositions pour la mise en route d’un autre atelier, pour son déroulement et se disent heureux de l’expérience, sans forfanterie. À la lecture à voix haute de quelques chroniques à laquelle nous nous sommes prêtés, on les sentait fiers du résultat. Certains ont applaudi, d’autres ont su exprimer un avis très pertinent quand il s’est agi de confronter plusieurs chroniques d’une même chanson.
Nous avons la prétention de penser que nous leur avons ouvert une petite lucarne sur la Chanson. Libre à eux maintenant de l’ouvrir grand et de s’en aller musarder dans ce vaste univers que leur proposent les chanteurs d’aujourd’hui !
On ne saura jamais ce que sont devenues les graines que l’on a semées…
La playlist de l’édition #16
1- Chloé Lacan, La pêche au Bonheur
2- Sages comme des sauvages, Les jeunes des villes
3- Pomme, J’suis pas dupe
4- La femme, Septembre
5- Hippocampe fou, Mes échecs
6- Lescop, Dérangé
7- Michel Cloup Duo, La classe ouvrière s’est enfuie
8- Pascal Bouaziz, Que du bruit
9- Clarika, Je suis mille
10- Sarah Toussaint-Léveillé, Ta tempête
11- Toma Sidibé, Afro-Picard
12- Hildebrandt, J’ai plein de pas
13- Nord, Mémorable
14- Emily Loizeau, Mona
15- Chelvarex, Aussi loin
16- Nicolas Michaux, A la vie, à la mort
17- Dorémus, Brassens en pleine poire
18- Katel, Cyclones
19- Lia, Chrysalide