Détours de Chant 2019 –  Coups de pousses – Matéo Langlois (© René Pagès)

Détours de Chant 2019 – Coups de pousses – Matéo Lan­glois (© René Pagès)

26 jan­vier 2019, Détours de chant- opus 18 Jour­née dédiée à la découverte

Coups de pousses

Avec

Diod (Emi­lie Cadiou, textes, accor­déon, cla­vier, chant & Ode Bout­tard, contre­basse, chant), Lombre, Ces­syle (gui­tare, voix), Matéo Lan­glois (cla­vier, saxo­phone, beat box, voix) Pap /​Comme la pre­mière fois (Anaïs Lafont & Char­lotte Cou­prie, Accor­déon, ban­jo­lé­lé, voix)


Le Bijou (Tou­louse)

Après tout, nous sommes sur le ter­rain des mots, non ? … Alors osons nous diver­tir de l’image sug­gé­rée par les « coups de pousses »… Des bour­geons, des reje­tons nous en avions par­mi les spec­ta­teurs. Et, disons –le d’emblée, c’était une chance que d’avoir, cette année encore, des lycéens par­mi nous. Accom­pa­gnés de leur pro­fes­seur, élèves de l’option musique du lycée St Ser­nin, ils ont la lourde tâche d’accorder leur coup de cœur à l’artiste qui sera pro­gram­mé aux Détours de Chant 2020. Grâce à eux, l’enthousiasme a été de mise tout au long des cinq concerts répar­tis entre après-midi et soi­rée. Leur joie, leur spon­ta­néi­té sont les garants d’une salle réac­tive en toutes cir­cons­tances. Leur jeu­nesse fait du bien à la chan­son, tout simplement. 

Bien enten­du il ne nous aura pas échap­pé qu’ils ont mar­qué un enthou­siasme sans frein pour Lombre dans l’après-midi puis pour Matéo Lan­glois en soi­rée, tous deux affi­chant quelques années seule­ment de plus qu’eux… Effec­ti­ve­ment, on peut com­prendre leur engoue­ment pour les 21 ans du pre­mier, sa mince sil­houette, che­veux mi-longs, petite barbe, le flow /​flot de ses textes qui essen­tiel­le­ment déroule les pen­sées d’un être aux prises avec un monde plu­tôt trouble dans lequel ils peuvent aisé­ment s’identifier… Rien que de très nor­mal, sauf qu’ici nous sommes au Bijou, dans une jour­née où se réunit bon nombre d’acteurs du réseau de la Région Occi­ta­nie et que l’enjeu peut être d’importance. Alors soyons hon­nête, si sa jeu­nesse est un atout ain­si que son appa­rente envie d’en découdre – bien des textes s’apparentent à une lutte à laquelle nous habi­tuent le rythme et les textes du hip hop – elles ne dis­pensent pas d’un retour sur l’écriture, ni d’une cer­taine humi­li­té. On ne sau­rait trop lui conseiller d’écouter d’autres artistes dans la même veine pour mesu­rer le che­min qui reste à accom­plir… Pour en prendre sim­ple­ment de la graine…

Au final, per­sonne ne sera éton­né que Matéo Lan­glois, tout aus­si jeune, rem­porte la mise. Si l’on consi­dère, une nou­velle fois – et sans s’en las­ser ! – son talent de poly ins­tru­men­tiste, ses recherches sonores, son habi­le­té à les assem­bler, les croi­ser. Si l’on s’attarde aux textes, à com­men­cer par le tout pre­mier « Vivre, si c’était comme un livre... » une riche méta­phore qu’il file avec un véri­table don d’écriture, si l’on se laisse aller aux images qua­si sur­réa­listes dans les­quelles il nous trans­porte sans effort, si on le regarde dan­ser, si on écoute le lan­gage de son saxo­phone, pal­liant à tout ce que les mots ne sau­raient dire…

Par ailleurs, si au cours de cette jour­née, il est aus­si ques­tion de tirer des leçons de cette édi­tion des « Coups de pousses », on note­ra que si la pro­gram­ma­tion du duo d’Ode Bout­tard et Emi­lie Cadiou pou­vait se jus­ti­fier au regard de la jeu­nesse de leur pro­jet Diod, il ne semble pas néces­saire pour elles d’avoir à faire leurs preuves. Une autre scène, sans aucun doute, aurait pu leur être accor­dée… Tout est maî­tri­sé, depuis le sou­ci de leur tenue de scène (cer­tains, pré­sents aujourd’hui, auraient pu s’en ins­pi­rer avec pro­fit…), leur conni­vence musi­cale, la tona­li­té des textes variée qui n’exclut pas la gaie­té, pas plus que la pro­fon­deur. Un spec­tacle sans aucun doute abouti.

Enfin reste à sou­li­gner l’effort de la pro­gram­ma­tion d’aller vers l’humour, la déri­sion, voire le bur­lesque. Certes la fan­tai­sie est sans aucun doute ce qui peut divi­ser le plus le public. Le pro­jet de Ces­syle méri­te­rait sans aucun doute d’être accom­pa­gné. Quant à celui d’Anaïs Lafont et Char­lotte Cou­prie, duo très ins­pi­ré du cirque, il nous a sem­blé par trop déca­lé, hors de pro­pos. Et si nous aimons beau­coup les clowns et l’immensité de ce qu’ils peuvent nous appor­ter, ici, nous avons eu beau­coup de mal à rire jusqu’au bout… Autour de nous la cris­pa­tion se devi­nait… Heu­reu­se­ment nos jeunes lycéens étaient là pour pal­lier à notre désenchantement.

Enfin que les pro­gram­ma­teurs conti­nuent de nous ravir avec ce moment là dans leur fes­ti­val, avec ces lycéens qui y mettent leur fer­veur, leur ardeur. Mais que nous soyons avec eux tou­jours de vigi­lants jar­di­niers, veillant sur cette chan­son mena­cée par de grands vents contraires.