Nicolas Fraissinet – Des étoiles dans les yeux – 2021 (©Droits Réservés)
1er novembre 2021, en écho au nouvel l’album de Nicolas Fraissinet, sorti le 28 octobre 2021 – 12 titres qui accompagnaient les 12 chapitres du roman du même nom
Des étoiles dans les yeux
Avec
Nicolas Fraissinet (textes, musiques, voix)
Avertissement : Ce texte ne saurait passer pour une chronique. C’est une pure fiction, un jeu d’écriture où se trouvent insérés en caractères gras les 12 titres de l’album et quelques mots, expressions, empruntés ici ou là aux chansons.
- Animal 2. La sève 3. Dis-moi 4. Quelques mots de ton frère 5. T‑Rex 6.Cigaliennes 7. Orphée 8. Sirène 9. Là-haut 10. Nuit 11. Eoliennes 12. Etoile de mer
Laissez-nous tournoyer
Il est devenu l’auteur adulé des médias ? Celui dont le nom s’étale en tête des consoles chaque automne ? Celui que l’on traduit dans toutes les langues ? Soit.
Aujourd’hui c’est décidé. Cette fois il n’hésitera pas, il ne repoussera pas à demain, victime d’une procrastination tenace.
Le temps est venu de mettre sa plume au service d’une grande cause. Le temps est venu de mettre un terme aux contes, aux mythes qui nous condamnent à une nuit éternelle, qui nous ravalent à l’état d’animal déchu, rampant, soumis à la tyrannie de forces invisibles, de quelques dieux avides de sang frais, ou de quelques tyrannosaures et autres T‑Rex ou Godzilla, écrasant tout sur leur passage…
Le temps est venu de regarder là-haut, plus loin, d’insuffler le courage d’y croire, de résister aux forces obscures, hostiles.
Voici donc son projet : réécrire ces histoires tragiques qui condamnent inéluctablement le beau, le grand, le pur Amour avant même qu’il ne soit né.
Par qui, par quoi allait-il commencer ? Il se mit à réfléchir longuement. Il interrogea ses plus proches amis, collaborateurs, écrivains, éditeurs. « Dis-moi, quel est le mythe, le conte dont tu aimerais modifier le dénouement ? Là, maintenant, tout de suite…. » Il écrivit à sa sœur tant aimée, sans laquelle il ne décidait rien. Il termina son message ainsi : « Quelques mots de ton frère qui rêve encore…. »
Il voulait mettre des étoiles dans les yeux de tous ses lecteurs, leur permettre de sentir la sève originelle parcourir à nouveau leur peau, leurs os, que les mots réveillent leur ardeur, le souffle vital de leurs tout premiers cris.
Un matin, au réveil, ce fut comme une révélation, une évidence. C’est par le mythe d’Orphée qu’il fallait commencer. Mettre fin au maléfice qui le fit se retourner pour regarder Eurydice et la perdre à jamais dans l’obscurité des Enfers. Cette fois et à jamais, il la ramènerait à la vie, ils regarderaient ensemble vers les prochains rivages. Elle deviendrait « cigalienne » à ses côtés : avec lui, elle chanterait, danserait… En un mot, libre !
Quant au conte suivant, ce serait La petite Sirène. Elle pourrait enfin rejoindre le monde des humains, être aimée et reconnue de son prince, échapper aux malédictions de la cruelle sorcière qui non seulement la priva de sa voix magnifique, mais ne lui accorda même pas le sort d’une étoile de mer, posée sur le sable, au fond de l’océan.
C’est vrai, l’œuvre était immense, réparer l’effet délétère de siècles de lecture, de siècles d’images figées dans nos cerveaux de pauvres humains.
Il se sentait Don Quichotte luttant contre les ailes des moulins à vent, il se sentait le vent même, luttant pour que la goélette fende les flots, pour que les éoliennes, tournent, tournent dans la plaine. Il les entendait gémir : « Laissez-nous tournoyer ».