Zaza Fournier & Alexis HK, Le Bijou, juin 2022 (©Droits Réservés)
8, 9,10 juin 2022, Inédit : Zaza Fournier & Alexis HK dans une création éphémère, après trois courtes journées de répétition. Les voici dans
Histoire de non amour
Avec
Zaza Fournier (accordéon, ukulélé, omnichord, piano), Alexis HK (guitare, ukulélé)
Le Bijou (Toulouse)
Au cours de la saison écoulée, Zaza Fournier comme Alexis HK sont venus profiter de la salle du Bijou, de sa « salle de poche », comme le dit Zaza, de la réaction du public tout proche, « presque épidermique »… L’un et l’autre en avaient fait un lieu tout indiqué pour tester leurs nouvelles chansons. Et Zaza avait confié son enthousiasme « Tu vois la joie ? Et bien cette joie, elle est exponentielle chaque soir… » Accompagnée du pianiste Pierre-François Blanchard, elle voulait « aller au plus près des morceaux, à l’os… Je n’ai plus le même âge, et j’ai envie d’être dans le présent des choses, ici et maintenant. » Est-ce pour cette raison, pour ce besoin d’authenticité, pour cette recherche, ce besoin de goûter l’instant présent dans son exacte texture, que ces deux artistes ont accepté le défi de Pascale et Emma Chauvet ? Nous savons combien le Bijou aime ces rencontres inattendues et nous savons aussi combien nous aimons ces créations là qui ont la saveur incomparable de l’éphémère.
Les premières secondes d’un spectacle sont essentielles, nous le savons. Elles nous installent, nous, public, dans une rencontre… Zaza Fournier est venue s’assoir côté cour dans un petit canapé de fer forgé, un coin salon, très intime. Sans micro, juste là, avec son ukulélé, dans sa petite robe très courte, elle chante un rendez-vous manqué… « Au cas où tu viendrais… C’est la musique de ton pas sur mes paupières closes… Mais ça n’est jamais toi… » Alexis HK est assis à quelques mètres, il la regarde intensément, visage fermé… Il prend la parole après la chanson pour exprimer ce qui sera le fil conducteur de leur rencontre scénique : Entre eux, l’amour est interdit, ne sera pas… Et c’est alors que s’installe un duo, elle à l’accordéon, parfois aussi au ukulélé, ou à cette petite harpe électronique qu’elle pose sur ses genoux, lui à la guitare ou au ukulélé… « Cette fille là n’est pas pour moi » …« Ce type là n’est pas pour moi… » et bien entendu, c’est sujet de douleur « Je sais qu’elle saura réduire mon cœur en miettes mais je ne m’en soucie pas… » Et nous finirons par les attendre ces interludes, ces moments surréalistes où ils évoquent les étapes de ce non amour… « Tu te souviens la première fois qu’on ne s’est pas embrassés… C’était bien aussi… C’était autre chose… Tu te souviens de la première fois qu’on ne s’est pas disputé ?… Tu te souviens du paquet de choses qu’on n’a pas vécu… » » Alors nous sommes d’autant plus surpris d’entendre Zaza enchaîner, dès la 3ème chanson, avec une ingénuité confondante, cette incroyable chanson coquine de Colette Renard, Les nuits d’une demoiselle… « Que c’est bon d’être demoiselle /Car le soir, dans mon petit lit /Quand l’étoile Vénus étincelle /Quand doucement tombe la nuit /Je me fais sucer la friandise /Je me fais caresser le gardon… etc, etc » Ils en font un duo, n’hésitant pas à transformer l’énumération de métaphores pour l’adapter au sexe masculin… Vous l’aurez deviné, c’est une friandise, un moment succulent ! Et d’ailleurs eux-mêmes diront de ce « non amour » qu’il est comme une malédiction, celle de deux enfants devant la vitrine d’une pâtisserie… Et Zaza de faire la liste des gâteaux inaccessibles puis d’enchaîner sur la beauté éthylique. Alexis répond avec une chanson que Zaza accompagne de la mélancolie de son accordéon… « Une vodka à la fraise fait l’idiote dans mon verre… Mon cœur se répand sur mes souliers » Des filles valsent autour, « des cœurs plein d’emphase ». Il ne sait plus : Rester… Partir ? « Je vais t’aimer, te quitter ?… » Bien sûr, on le devine, ce spectacle tout frais connaît parfois quelques légers accrocs, mais c’est si bon cette authenticité. On retrouve, comme on si attendait, Alexis en « ours bipolaire, ermite en colère, en apesanteur entre les deux hémisphères » et il ne manque pas de rappeler alors que Zaza jouait dans son clip, cette histoire de solitaires qui ne se rencontrent pas.
Quand Alexis cherche auprès de Zaza une réponse à son dilemme, à sa « vie pitoyable » dit-il, « ronchonchon » comme il sait l’être, ils nous offrent un autre grand moment de ce concert, la reprise insolite, franchement jubilatoire de la rengaine de Philippe Lavil : « Avec les filles je ne sais pas quand il faut ou quand il faut pas /Parler du temps ou bien parler d’amour, aller chez moi ou faire la cour... » La réponse sera peut-être dans la fugue entre amis, quand on a fini de croire en l’amour éternel… « On se barre d’ici /Mets du vent dans ma mèche /On roulera à deux-cents /Dans ta calèche /On se barre d’ici… » Et surtout, surtout, avant de s’en aller d’ici-bas, avant d’aller « voir si c’est beau vu de là-haut », ils nous invitent, dans un dernier titre, à vivre chaque instant comme le dernier présent…
Bien entendu le public fait une ovation à ce duo, a même du mal à se contenter d’une seule chanson de rappel … Et pourtant, quelle chanson pour finir, Alexis au ukulélé, Zaza à l’accordéon …
Il est doux le temps des cerises
Et sa douceur me rendra fou
Dans le jardin de mon père
Y’a un cerisier mal fichu
Il est comme ça depuis la guerre
J’espère ne jamais voir d’obus (Le cerisier)
Je souscris à tout ce qui est dit ici, c’était une excellente soirée hier.