Pierre Delorme et Frédéric Bobin (© Claude Fèvre)

Pierre Delorme et Fré­dé­ric Bobin (© Claude Fèvre)

18 juillet 2015 – 11e Ren­contres Marc Robine, On connaît la Chanson

Concert à la média­thèque – Leo­nard, Bob et les autres

Avec Fré­dé­ric Bobin et Pierre Delorme, gui­tare et voix


Média­thèque Aimé-Césaire – Blan­zat (Puy-de-Dôme)

Chan­sons toutes nues, ce pour­rait être aus­si le titre de ce concert sans sono­ri­sa­tion, « débran­ché », ain­si que le disent les musi­ciens. Le choix est clair : il s’agit bien de favo­ri­ser la ren­contre avec le public, de se dépouiller de tout arti­fice. Le mot prend ain­si toute sa saveur au fes­ti­val de Blan­zat, autre­ment nom­mé Ren­contres Marc Robine.

Chan­sons toutes nues, c’est aus­si le titre de l’album de Pierre Delorme qui, en 2002, fit signe à Fré­dé­ric Bobin, l’appela, l’interpella pour abou­tir plus tard à leur créa­tion com­mune. Il en est de la chan­son comme de toutes les créa­tions artis­tiques. On y vient par les autres, avec les autres. Et c’est ain­si qu’une famille se crée pour gui­der, sou­te­nir, bali­ser votre voyage de repères. Pierre Delorme, tout comme Rémo Gary, est de cette famille-là pour Fré­dé­ric Bobin. Et c’est un sup­plé­ment d’âme don­né à leur concert de l’après-midi. Le public ne s’y est d’ailleurs pas trom­pé. Il est venu très nom­breux dans la cha­leur cani­cu­laire. Le moment pro­met d’être rare. La petite salle est comble.

Cha­cun est venu avec son bagage de sou­ve­nirs car ces chan­sons-là parlent à nos mémoires, emprun­tées au réper­toire folk de Léo­nard Cohen, Bob Dylan mais aus­si à des noms bien moins connus, comme Tom Pax­ton et Townes Van Sandt. Et bien sûr celui qui assure magis­tra­le­ment le lien avec ce réper­toire c’est Graeme All­wright, pas­seur entre notre vieux conti­nent et l’Amérique qui a fait rêver tant d’entre nous. Nous décou­vri­rons, au gré de cet hom­mage, que Pierre Delorme a pris à son tour lar­ge­ment sa part de transmission.

On s’est donc lais­sé prendre à la nos­tal­gie, à la décou­verte aus­si. Les chan­sons dévident leurs grands espaces, où émerge le goût de l’errance, tout un pas­sé de vaga­bon­dage du temps de la « beat géné­ra­tion ». Les chan­sons ont alors pour titre D’où je viens, J’ai tant et tant mar­ché… On y croise des por­traits de femmes dont l’image reste fixée sur l’écran des nuits blanches, La fille du Nord, Suzanne ou cette Marie dont le sort tra­gique est comme un sym­bole des fra­cas­sés du rêve amé­ri­cain. Et puis l’amour, l’amour bien sûr, celui de Mar­ga­ret qui veille sur son homme bri­sé par la guerre (Le Hol­lan­dais), celui de Ton ché­ri ce soir ou de Si j’appelais : « Si tu m’appelais, moi je fran­chi­rais l’hiver pour t’aimer… »

Bien sûr, ces chan­sons-là évoquent nos déchi­rures et nos drames, comme La com­plainte du par­ti­san, poi­gnant hom­mage à la Résis­tance et qui, signé Emma­nuel d’Astier de la Vige­rie fit un bien étrange détour par la voix de Cohen pour nous reve­nir. Bien sûr, par­fois le texte garde son mys­tère, comme Les Dia­mants dans la mine et son refrain : « Il n’y a plus de lettres dans vos boites /​Il n’y a plus de rai­sins sur la vigne /​Il n’y a plus de cho­co­lat à bouf­fer mes amis /​Il n’y a plus de dia­mants dans la mine ».

Mais au bout du compte, on garde un espoir fou : Demain sera bien et c’est bon d’y croire encore avec Léo­nard, Graeme, Bob et les autres, avec Fré­dé­ric et Pierre qui font don de leur ami­tié, du son de leurs gui­tares, et de leur fidé­li­té à cette paren­thèse folk.

Article initialement publié sur le site Nos Enchanteurs :
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