B. comme Fontaine, un quartet vertigineux (© Hervé Suhubiette)

Gat­shen’s, « ça sent bon le par­tage » (© Claude Fèvre)

12 octobre 2016 – Concert de Gatshen’s en duo – chanson France-Congolaise

avec Gaëlle Cotte (voix) et Pyt­shens Kam­bi­lo (gui­tare)

Le Bijou (Toulouse)

Comme le nom « Ga-Tshen’s » nous le sug­gère, avec l’assemblage des deux syl­labes ini­tiales de leurs pré­noms, ce duo c’est l’histoire d’une ren­contre, d’un par­tage, d’une conni­vence lin­guis­tique. Nous décou­vrons que c’est aus­si une com­pli­ci­té vocale, musi­cale… C’est un ren­dez-vous avec la part lumi­neuse de notre huma­ni­té. Com­ment y résister ?

Ce soir l’émotion est à son apo­gée quand on sait que ce concert ‑comme d’autres nom­breux cette semaine dans la Région – est le pro­lon­ge­ment du prix du public de l’ultime Alors Chante, dépla­cé à Cas­tel­sar­ra­sin pour fina­le­ment y connaître sa fin… Sa géné­reuse ini­tia­trice, pré­si­dente de l’association Chants Libres, mili­tante de la pre­mière heure est dans la salle. Gaëlle Cotte lui offri­ra l’une des nou­velles chan­sons du duo et ces mots où nous enten­dons la lita­nie des com­bats, des luttes, des errances humaines : « Tu es la sagesse /​Je suis la folie … Tu es le jour /​Je suis la nuit… Cette prière sur­tout « Laisse-moi vivre à corps et à cris ! »

Ce duo c’est un musi­cien, un gui­ta­riste qui, à lui seul, par­vient à nous trans­por­ter sur des rives loin­taines où battent les cœurs et les tam­bours qui leur répondent. Ses doigts dansent sur les cordes et Gaëlle sou­vent les miment – main gauche qui des­sine des ara­besques. Pyt­shens, c’est une longue sil­houette élé­gante d’homme noir, visage auréo­lée d’une courte barbe, petit cha­peau rond et bottes noires. Gaëlle, chan­teuse à la voix d’or, vêtue d’une longue tunique blanche posée sur étoffes légères noires, a la ron­deur d’une déesse mère de nos ori­gines ances­trales. Ses che­veux ramas­sés, sous des fou­lards savam­ment noués, comme seules les Afri­caines savent le faire, laissent émer­ger quelques nattes… De longs col­liers de graines colo­rées pendent à son cou. Pieds nus, elle danse, cha­loupe sou­vent et sur­tout elle sou­rit… Elle sou­rit tout le temps et nous cueillons, ravis, cette géné­ro­si­té là.

Le chant de Gatshen’s alterne, mêle, mélange deux langue, le fran­çais et le lin­ga­la, langue du Haut Fleuve. Elles se cherchent et se taquinent, s’aiment. C’est une évidence.

On a le pri­vi­lège, por­tés par les deux voix, de s’en aller au vil­lage, au mar­ché, de croi­ser des hommes fiers de leurs forêts, de leurs rivières, d’accompagner le sort des femmes, celle dont les pas scandent sa déter­mi­na­tion, l’appel de sa liber­té « Jamais on ne lui dira vers où elle doit aller », celle qui pri­vée d’enfance, porte son enfant sur son dos. On ne sera pas éton­nés d’entendre la reprise de Maxime Lefo­res­tier, Né quelque part… « On choi­sit pas ses parents, on choi­sit pas sa famille »… On s’élève aus­si au chant uni­ver­sel « Tous ces peuples qui partent au com­bat sont tous les mêmes », on s’en vient aux sources des mots « Autant le mot est léger pour celui qui le jette /​Autant le mot est lourd pour celui qui le reçoit » et l’on revient volon­tiers à l’intimité du couple et à ses col­loques sen­ti­men­taux sans fin.

Le concert s‘achève sur une impro­vi­sa­tion, cadeau de l’éphémère beau­té d’un chant d’espérance.

Gaëlle par­tage par ailleurs son talent vocal dans des ate­liers, des cours, dans la par­ti­ci­pa­tion à d’autres pro­jets comme le pre­mier album d’Eryk.e. Elle puise son ins­pi­ra­tion par­tout où s’immisce la voix humaine. Elle par­ti­cipe, aux côtés d’une ving­taine de per­for­mers, au Batik Sound­pain­ting Orches­tra à Cler­mont-Fer­rand sous la direc­tion d’Eric Cha­pelle, espace de ren­contres musi­cales sans fron­tières : jazz, clas­sique, musiques latines, élec­tro­niques, expérimentales.

« Ca sent bon le par­tage ». C’est elle qui le dit.