Manu Galure et Imbert Imbert visitent Léo Ferré (© Claude Fèvre)

Manu Galure & Imbert Imbert visitent Léo Fer­ré (© Claude Fèvre)

18 novembre 2016 – réouverture de Chez ta Mère
Manu Galure & Imbert Imbert visitent Léo Ferré : Yes, I am un immense provocateur

avec Manu Galure (pia­nos, chant) et Imbert Imbert /​Mathias Imbert (contre­basse, chant)

Chez ta Mère (Toulouse)

La Cave Poé­sie, Chez ta Mère et la librai­rie Flou­ry frères s’associent pour lui faire sa fête. Joyeu­se­ment, irres­pec­tueu­se­ment, avec la furieuse envie de redon­ner voix à cette parole d’un autre temps, dis­pa­ru il y a plus de vingt ans mais qui nous parle de demain.

C’est à Manu Galure et Imbert Imbert que l’on a confié les clés de la mai­son Fer­ré. Un pia­no, une contre­basse, deux voix. Galure c’est peut-être le plus fer­réen des chan­teurs tou­lou­sains… Imbert Imbert c’est le plus punk des Fer­ré­ma­niaques… Les voi­ci en duo pour ce concert Fer­ré pas comme les autres. Lais­sez-les vous surprendre.

Fer­ré cette année aurait eu 100 ans…

« Et si toutes les plumes /​avaient Ver­laine au bec /​et cha­cun sa cha­cun” /​On n” vivrait plus qu’avec la for­tune, /​quelques thunes, /​deux bou­quets trois chan­sons et la lune… »

Oui, com­men­çons ain­si avec Manu Galure au pia­no qui chante seul d’une voix sin­gu­liè­re­ment douce cette chan­son d’espérance. Manu Galure qui nous est arri­vé en cos­tume, che­mise blanche et cra­vate avec sa pince dorée… Le public en a ri… Salut à Léo ? Salut au café asso­cia­tif Chez ta Mère qui vient de rou­vrir ses portes ? Ou bien pied de nez… ? Sur­tout quand on voit son duet­tiste revê­tu d’une tenue cha­mar­rée, fan­tai­siste s’il en est.

Nous sommes au plein cœur du concert, plus de la moi­tié. Écou­tons cet hom­mage à la poé­sie et à la chan­son. Imbert Imbert marque un temps de repos car il vient de nous offrir une inter­pré­ta­tion de légende de La Mémoire et la mer. Son débit accé­lé­ré, sa contre­basse dont il arrache presque un cri, c’est incon­tes­ta­ble­ment l’acmé de cet hommage.

Saluons d’abord la ren­contre de ces deux artistes. C’est une bien belle idée. Ils n’avaient jamais tra­vaillé ensemble. Les voi­ci liés par la visite d’une œuvre immense et dif­fi­cile. C’est avec leur uni­vers que cha­cun leur tour ils entre­ront dans celui de Léo Fer­ré. On recon­naî­tra en effet cha­cun dans leur choix.

Pour Imbert Imbert et sa contre­basse qu’il frappe ou caresse de son archet, ce sera Cette Bles­sure, Thank you Satan, ces vers qui résonnent étran­ge­ment aujourd’hui « Et qu’on ne me fasse point taire /​Et que je chante pour ton bien /​Dans ce monde où les muse­lières /​Ne sont pas faites pour les chiens… », Ton style, Ni dieu ni maître – c’est alors que Manu s’assoit bien en face de lui pour le regar­der jouer. Nous par­ta­geons, émus, cette intimité-là.

Pour Manu Galure avec ses pia­nos qu’il déglingue à loi­sir muni de son rou­leau de scotch pour en modi­fier les notes, ce sera La mau­vaise graine, La vie moderne – moment joyeux où effec­ti­ve­ment on peut ima­gi­ner tout ce que Léo ajou­te­rait aujourd’hui – Les cor­beaux d’Arthur Rim­baud dont on retien­dra une fois encore l’appel – déses­pé­ré certes – « Mais, saints du ciel, en haut du chêne, /​Mât per­du dans le soir char­mé, /​Lais­sez les fau­vettes de mai /​Pour ceux qu’au fond du bois enchaîne, /​Dans l’herbe d’où l’on ne peut fuir, /​La défaite sans ave­nir », La For­tune, Est-ce ain­si que les hommes vivent et l’inoubliable appa­ri­tion de Lola.

C’est ensemble, en duo qu’ils ouvrent le concert avec Comme à Ostende. On com­prend dès ce moment-là les arran­ge­ments qu’ils s’apprêtent à nous offrir. On devine la com­plexi­té des choix, les heures de tra­vail à défaire, refaire, recréer… Et l’on s’incline devant les der­nières heures de répé­ti­tion dans le chan­tier inache­vé de la réou­ver­ture de Chez ta Mère, sur fond de per­ceuse, vis­seuse et autre outil indé­si­rable qui s’invitent.

Le concert s’est ache­vé sur deux chan­sons de rap­pel : Mon­sieur William, employé modèle sacri­fié à un coup d’amour dans la 13e ave­nue et L’Âge d’or, cet âge où nous aurons enfin l’amour. Nous chan­tons tous en chœur, texte cal­li­gra­phié en main…

« Et le plus sou­vent Lun­di sera dimanche »…