Lucien la Mauvaiz Graine en quartet (© droits réservés)

Lucien la Mau­vaiz Graine en quar­tet (© droits réservés)

26 janvier 2017 – 16ème Détours de Chant – Lucien La Movaiz Graine en quartet 

avec Julien Mal­herbe alias « Lucien »(chant, gui­tares, accor­déon) – Julien Tre­fel ( mul­ti-per­cus­sions, chœurs) – Mathieu Laciak ( cla­viers, chœurs) – Nico­las Caillot (contre­basse, basse, chœur) – Mise en scène : Guillaume Renauld

La Pause Musicale – Salle du Sénéchal (Toulouse)

Cette salle du Séné­chal est déci­dé­ment la garan­tie de faire salle pleine, de jouer à « gui­chet fer­mé ». Sauf jus­te­ment qu’il n’y a pas de gui­chet et qu’une demi-heure avant le début du concert la salle est déjà pleine ! De quoi rêver ! Cette pause gra­tuite à l’heure du déjeu­ner est une aubaine.

Pour le quar­tet de Lucien La Mau­vaise Graine c’est l’opportunité de tes­ter une par­tie de son nou­veau spec­tacle qui s’intitulera Juste en face… En face ? A sa fenêtre, dans sa rue ? De l’autre côté de soi-même ? Toi ? Moi ? Allez savoir… Pour l’heure on s’attend un peu à tout. Car Julien est de ceux qui déroutent, dérangent, ne sont jamais vrai­ment où on les attend. Impré­vi­sible chan­teur. Trans­for­miste à ses heures dans son per­son­nage tou­chant d’Yvette Gélé­nerr, môme atta­ché à sa peluche d’enfant qu’il garde jusqu’au bout, tout près du cœur, dans son solo.

Julien Mal­herbe aime endos­ser des per­son­nages, comme autant d’états d’âme. Il a besoin du cos­tume, de la défroque, du détail ves­ti­men­taire qui don­ne­ra à sa peau la cou­leur, la tex­ture d’une autre peau… Une façon de se pro­té­ger aus­si, de prendre un peu dis­tance avec ce qui émeut, bou­le­verse, ren­verse. Pour­rait faire choir. Car l’artiste est fra­gile sur son fil. Comme nu devant le public.

C’est un art dif­fi­cile que de jon­gler avec la mise en scène, avec les gri­maces, avec les dia­logues entre musi­ciens, avec les faux sem­blants sans tra­hir ce que l’on garde au fond de soi d’essentiel à trans­mettre, à dire, à par­ta­ger avec le spec­ta­teur. Nous savons que Julien Mal­herbe a le cœur lourd de tout ce que cette socié­té, ce monde trim­balle de vio­lences, d’injustices. Il le dit. Il le chante, sans jamais s’y com­plaire, avec la conni­vence des trois musi­ciens. Une conni­vence tel­le­ment évi­dente dans leurs échanges de regards, leur joie par­ta­gée de jouer, de chan­ter. Ces regards devien­dront même échanges de rôles, échanges d’instruments. C’est une part impor­tante de la réus­site de ce pro­jet. La musique y joue son rôle car « le rythme est par­tout », comme un écho du bat­te­ment de nos cœurs. La touche est don­née dès l’ouverture du concert avec quan­ti­té d’effets ryth­miques. Et nous aurons matière à dan­ser, bien que pri­son­niers de nos places assises. Nous accueillons, ravis, le pou­voir des sons, de rap en slam, de reg­gae en fla­men­co… Et quand viennent la dou­ceur et la ten­dresse, on ferme les yeux au lamen­to de l’accordéon.

Disons tout net que ce qui s’est pro­duit devant nous pen­dant une cin­quan­taine de minutes nous a convain­cus. D’ailleurs, per­sonne n’a quit­té son fau­teuil. Les applau­dis­se­ments laissent croire que le pari – osé par­fois – est gagné.

En face du cor­tège de nos maux, Juste en face nous dit Julien La Movaiz Graine il nous reste le sou­rire d’un enfant, il nous reste l’étreinte, « Serre-moi fort, encore et encore ! », il nous reste « l’été, le prin­temps plus fort que l’hiver ».

Il nous reste des « rires, des fleurs et des chants ». Il nous reste à « dégus­ter cette vie comme un fruit pré­cieux ».