26 février 2015 – Création de Georges et moi
Spectacle créé avec la collaboration artistique de François Morel
Avec Alexis HK, Simon Mary (contre-basse) et Loïc Molineri (guitare)
Le Bijou (Toulouse)
On savait le projet en route, l’affiche de gris et de rouge nous promettait un Alexis sur le divan, un Georges en psy et le nom de François Morel en partenaire artistique. Le trio aiguisait inévitablement nos appétits et notre curiosité et vous devinez que le public s’est précipité au Bijou, impatient et joyeux avant même que débute l’hommage.
Car il s’agit bien d’un hommage au tonton Georges, celui qu’Alexis, parrain des rencontres d’Astaffort de septembre dernier, présente à Yannick Delneste venu l’interviewer, comme « un philosophe, un précepteur, un mec chez qui on se réfugie quand on n’a pas envie de suivre les religieux ou toute personne ayant un avis très arrêté des choses. »
Le spectacle est accompagné par Alexis lui-même, très chic, très classe dans son costume de velours noir, Simon Bary à la contrebasse et Loïc Molineri à la guitare, tous deux discrets et en même temps d’une efficacité redoutable (parfois l’attention se laisse dérouter du texte pour savourer l’accompagnement). Il alterne monologue et chansons, une bonne quinzaine, des irrévérencieuses, des polissonnes principalement.
D’ailleurs on est informé du propos dès l’ouverture avec Le pornographe, suivi de La ronde des jurons. C’est entre ces deux chansons-là que l’artiste installe son personnage. Au fil des chansons il raconte alors une histoire – la sienne ? En partie sûrement – celle d’un garçon au penchant affirmé pour la mélancolie, la dépression, qui a la chance d’avoir des parents « cool » (normal, ils écoutent Brassens !). Grâce à eux il entend un jour Fernande qui change sa vie.
Il s’adresse à Georges et précise tout aussitôt que pour plus de commodité, tout le monde ce soir s’appelle Georges. Il lui dit avec pas mal d’ironie combien le monde a changé. Il commence par le vocabulaire puis, au cours du spectacle, ce sera l’adultère que les nouvelles technologies transforment, la disparition de la vieillesse (!) et des cons (si, si !) « tout le monde va bien, se sent à l’aise », il souligne que les arts plastiques, le dessin surtout, sont devenus dangereux, qu’il est devenu difficile d’accéder à la gloire, faute de censure. Toutefois, « il y a des trucs qui n’ont pas changé »… comme le canapé rouge de Michel Drucker ! Bon, vous voyez un peu ? La patte de Morel évidemment…
La voix du monologue est celle d‘un confident, légèrement compassée, dont l’efficacité humoristique est immédiate. Quand il rapproche sa chaise du public pour lui confier son désarroi, c’est pour chanter La fessée en entrecoupant les strophes de l’expression de ce qu’il nomme son « interlocation ». Il n’hésite pas à glisser quelques anachronismes irrésistiblement efficaces, comme « ptdr » en traduction de « tous deux nous rigolâmes », ou le mot « intifada » dans A l’ombre des maris.
Le florilège nous ravit bien sûr. La voix est belle et grave et lorsque l’interprète est délivré de la guitare, une gestuelle libérée apporte sa dimension scénique.
On pourrait élire à notre tour, parmi les chansons consacrées aux femmes – les « emmerdantes, emmerdeuses, emmerderesses » – la reprise de La religieuse, du « lourd », ou bien aussi des textes moins attendus, comme La rose, la bouteille et la poignée de main, Heureux qui comme Ulysse et même la chanson tendre de son (vrai) père Jean-Claude ou la toute dernière en rappel : Le roi boiteux.