Jean-Luc Debattice (© droits réservés)

Jean-Luc Debat­tice (© droits réservés)

15 juillet 2015 – 11e Ren­contres Marc Robine, On connaît la Chanson

Jean-Luc Debat­tice – D’i­ci là loin d’ici

Avec Jean-Luc Debat­tice (chant, guitare)


La Mus­cade – Blan­zat (Puy-de-Dôme)

Expé­rience sin­gu­lière que de s‘ouvrir sans tran­si­tion à l’univers de cet artiste après l’émotion vive qui venait de nous étreindre à l‘écoute des quelques chan­sons de Laurent Ber­ger et du pia­no de Natha­lie Fortin.

C’est vrai que c’est aus­si ce que nous atten­dons d’un fes­ti­val. Qu’il nous sur­prenne, nous désta­bi­lise, pour­quoi pas, dans nos conforts d’écoute. Ce soir l’effet était réus­si, conve­nons-en, même si d’évidence, ce n’était cer­tai­ne­ment pas le cal­cul de la programmation.

Sans doute un temps de pause, de « décan­ta­tion » nous aurait-il été néces­saire pour abor­der cet uni­vers de fli­bus­tier en lutte contre les démons de notre huma­ni­té « qui passe à la trappe ».

Il y avait en effet une forme de vio­lence dans son accom­pa­gne­ment abrupt de la gui­tare, dans sa voix qui appelle, déchire, pro­voque, qui flirte avec le théâtre. Bien sûr, Jean-Luc Debat­tice nous appa­raît clai­re­ment comme un comé­dien aguer­ri. Entre théâtre, chan­son et poé­sie, sa longue fré­quen­ta­tion des poètes du Chat Noir ou de Jim Mor­ri­son par exemple, lui a sans doute don­né ce jeu, cette expres­sion. Non dépour­vu d’humour, de déri­sion, « Moi, j’me sens bien quand tout va mal », il sait user du lan­gage de son corps, de ses dépla­ce­ments, de son visage qui se tord, grimace…

Bien sûr on est tou­ché par la say­nète de l’homme sau­tant par la fenêtre, entre tra­gé­die et bur­lesque, accom­pa­gnée d’un enre­gis­tre­ment pia­no – contre­basse – bat­te­rie. Le texte pro­voque et fait mouche. On appré­cie aus­si ce salut pathé­tique au vieux frère qui joue son der­nier rôle. On ne reste pas insen­sible non plus à la danse désar­ti­cu­lée de l’homme écor­ché vif par le temps, les doutes, l’absurdité, l’homme « sans cur­ri­cu­lum vitae et sans QI ».

Mais on est beau­coup moins convain­cu par le long enchaî­ne­ment de chan­sons inter­pré­tées sur le même tem­po de la gui­tare, sur la même tona­li­té, avec cette voix qui nous pro­voque, sur­tout lorsque l’interprète lit ses textes, les yeux plus sou­vent sur son pupitre que tour­nés vers le public.

Avouons, on se lasse, on s’ennuie de cette vision apo­ca­lyp­tique de la vie, de cette chaîne humaine, ce « trou­peau haras­sé », ce monde en déca­dence. On entend certes l’appel déses­pé­ré conte­nu « Ah ce serait si simple, vou­loir que la vie aille sur les rails » et l’on pour­rait alors chan­ter des ballades…

Lorsque Jean-Luc Debat­tice nous laisse sur ce constat « Il n’y a plus de griots, de chants au cœur des hommes » on vou­drait lever le camp, s’en aller véri­fier que dans la nuit le chat noir est tou­jours assis sur son crois­sant de lune.

Article initialement publié sur le site Nos Enchanteurs :
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