Chantons sous les Toits – Baptiste Dupré – mai 2022 (©Claude Fèvre)
8 mai 2022 – Présentation des artistes Chantons sous les Toits ! Saison 2022 – 2023 organisée par L’Oiseau Lyre Compagnie
Faites vos choix !
Arthur de la Taille, Liz Van Deuq, Sale Pierrot, Angéline, Clément Bertrand (absent – vidéo de présentation) Baptiste Dupré, Olivier Eyt, Lula Heldt, Mélanie Arnal
Salle communale – Lescure (Tarn)
Il n’y a pas si longtemps nous étions ici même, dans cette salle de village albigeois et nous écrivions : « Tout le monde connaît ces salles de village au plafond haut, à la froideur légendaire… Alors on met un tapis moelleux, on évite bien entendu de s’installer sur la scène trop haute et trop vaste, on ajoute quelques lumières chaudes… Et la présence de l’artiste fait le reste. » Cette fois ils seront neuf à se charger de cette mission – parfois venus de l’autre bout de la France ! – nous donner envie de les écouter bien davantage, de rassembler les voisins, les amis sous son toit, dans son salon, son grenier, sa grange, une ou deux fois l’an… Certains, disons-le, font encore beaucoup plus, tant ils sont devenus dépendants de ce bonheur à partager. C’est l’occasion de souligner la fidélité de ces accueillants et accueillantes qui, le plus souvent, sont aussi ceux qui participent à la création des albums par leurs dons. Certes la Chanson le mérite bien mais on ne saurait trop remercier tous ceux et celles qui se font ainsi spectateurs assidus, diffuseurs et producteurs de l’ombre.
Voilà donc qu’après la première édition du festival « Sous les toits de Lescure » où nous avions entendu Joce et Louise O’Sman, l’Oiseau-Lyre Compagnie persiste et signe avec la commune dont il faut souligner là aussi l’engagement… C’est une longue chaîne humaine qui sauve la Chanson, les chanteurs et les chanteuses. L’on se prend à rêver que chaque département se prenne un jour d’amour pour elle, comme ici dans le Tarn…Résumons : un évènement majeur comme l’est Pause Guitare début Juillet, qui à côté de plateaux prestigieux, ménage des rendez-vous avec la Chanson, avec ceux dont personne ne parle dans les grands médias, relayé tout au long de l’année par d’autres rendez-vous que peaufine sans relâche Arpèges et Trémolos ( Week-end avec Elles, Un bol d’Airs) par l’activité d’un lieu majeur comme le Café Plùm à Lautrec, par les rendez-vous de Chantons sous les Toits !…
Venons-en aux neuf artistes auditionnés aujourd’hui par ceux et celles qui bientôt les accueilleront sous leur toit, de septembre 2022 à août 2023. Précisons qu’ils ne seront pas les seuls à pouvoir être choisis puisque tous ceux qui ont eu une date dans la saison écoulée restent en lice… Ils sont vingt deux ! Si cette précision attise votre curiosité, rendez-vous sur le site de L’Oiseau- Lyre compagnie. Vous verrez qu’il y a du beau monde !
Une fois encore la sélection d’aujourd’hui nous démontre combien la chanson nous est proche, combien les textes nous parlent de nous, et comment elle s’habille de toutes les nuances sonores. Arthur de la Taille et son accompagnateur à la batterie ouvrent le bal avec un acte foi… Il y aura toujours « des chansons comme du velours », nous assure-t-il et cette confiance là fait du bien. On aime aussi retrouver, sur un rythme reggae, ce portait de femme, dans l’empreinte de Ma Môme de Jean Ferrat qui, pourtant, cette fois pourrait bien jouer la fille de l’air… On retrouve ensuite à son piano virevoltant Liz Van Deuq dont on connaît la plume agile et malicieuse… Elle joue des mots et de leur capacité à s’emmêler les syllabes mais elle peut aussi délivrer d’importants messages comme dans son bel hommage à la vieillesse : « Rien à foutre d’être vieux ! » Voilà qui est dit !
Sale Pierrot lui, avec sa belle énergie communicative, enchaîne subtilement sur ce thème en évoquant la ballerine d’une boîte à musique, puis sur une composition de Gérard Morel s’en prend aux… cons ! Il finit avec une forme d’autoportrait – allez savoir, avec les chanteurs… – un amoureux des halls de gare, des salles des pas perdus… Un voyageur immobile qui se raconte des histoires, se fait des films… Le public visiblement a aimé suivre ses pas perdus… Angéline, elle, a quelque chose des chanteuses réalistes du siècle passé. Petite silhouette fine, elle en a le franc parler, la présence scénique, et quand elle évoque les vies fauchées par la guerre on ne doute plus de cet héritage. Elle crée la surprise aussi du côté de la dérision, de l’humour. Elle a tout ce qu’il faut pour séduire le public d’un concert intimiste. Viennent ensuite quelques images vidéo pour combler l’absence de Clément Bertrand qui s’en revient dans le Tarn avec un nouveau projet, de retour à son piano et en compagnie d’une violoncelliste, après les sons électriques. C’est ainsi d’ailleurs que nous l’avions découvert en 2006. Bien entendu, même à distance, on retrouve ce qu’il nous a inspiré. Souvent en effet il nous évoque Léo Ferré et « particulièrement dans la confrontation d’une langue élégante, racée, avec des mots triviaux » et c’est avec une profonde émotion que l’on entend à nouveau Les seins de ma mère.
« Petites choses et vaste monde » dit le titre du projet de Baptiste Dupré, en compagnie d’un bassiste qui assure aussi les chœurs. On avoue une faiblesse pour ce duo folk et comme le dit sa première chanson on aurait eu envie de s’attarder dans leur répertoire et « demeurer un instant dans la beauté du temps… » Il est beaucoup question de temps qui passe, qui tout efface… Mais on aime aussi être soudainement arraché à la mélancolie par une touche d’humour véritable ! Olivier Eyt qui vient ensuite a choisi de jouer du piano debout. Soudainement revenu au solo, il lui faut prendre ses marques pour interpréter les chansons de son nouvel album qu’il a mises en scène avec deux complices connus des tarnais, Bastien Lucas et François Puyalto. On les verra bientôt au café Plùm. Il choisit trois titres qui illustrent la diversité des atmosphères et des thèmes, le titre éponyme Un pas, deux pas… cet homme qui marche à l’assaut de sa vie et du temps qui passe, le portrait d’une grand-mère assez peu convenu, et cette incursion dans le désir « Juste pour voir… »
Pour finir, nous entendons deux projets assez divergents. Le premier est celui de Lula Heldt, repérée au Printival à Pézenas. Elle a la particularité de s’accompagner du violoncelle comme d’une contrebasse. Elle a quelque chose d’une conteuse, surtout dans le premier texte où elle s’aventure dans la foule. Notons qu’elle sait pépier comme un oiseau… On aurait aimé en percevoir la justification dans la chanson qui suivait. Bref, il nous faudra l’écouter plus longuement pour comprendre l’engouement qu’elle a suscité. L’audition finale avait de quoi surprendre. Mélanie Arnal est habillée d’une longue robe rouge à l’inspiration andalouse… On cherche un instant le propos… burlesque ? Cabaret ? … Que l’on me pardonne cette fausse route ! Cette confidence démontre, si besoin était, combien les premières secondes d’un spectacle, quel qu’il soit, sont essentielles. On apprend que le projet repose sur les aventures amoureuses d’un personnage nommé « La fille allumette ». Les trois chansons nous l’évoquent successivement en quête de l’homme idéal, puis « ronde comme une déesse » dans l’attente d’une enfant et enfin, avant quelques mesures au violon, se laissant emporter par le vent…
Avec Chantons sous les Toits, tout s’achève autour de douceurs qu’apportent les spectateurs. C’est donc autour d’une table garnie de gâteaux et de boissons que les premières impressions se sont échangées entre artistes et foyers accueillants, environ vingt cinq… Dans quelques jours une nouvelle programmation 2022 – 2023 sera annoncée par Frédéric Blanchard, maître d’œuvre infatigable, lui-même auteur-compositeur-interprète.