Chouf et Simon Barbe (© Michel Nino)
11 août 2015 – Chouf en duo
Avec Simon Chouf (guitares, voix) et Simon Barbe (accordéon)
Cave Poésie René Gouzenne (Toulouse)
Ce duo n’est pas inconnu des plus attentifs d’entre vous, et l’on aurait presque la fierté d’écrire qu’en fin d’année dernière on vous délivrait un scoop : Simon Chouf invitant un accordéoniste pour des concerts plus intimistes. Étonnant, le duo ne s’était pas encore produit dans sa ville !
C’est en pleine saison estivale, quand tous les lieux de spectacle font relâche, que la Cave Poésie l’accueille promettant le galop d’essai de chansons neuves, pendant cinq soirs de suite. Aujourd’hui c’est donc double première ! Une bonne cinquantaine de spectateurs répond à l’invitation. Autant dire que la petite salle nichée dans la briquette rouge de Toulouse est comble et peut, si besoin, rassurer Chouf sur son audience.
Le duo a la bonne idée d’exploiter judicieusement l’espace offert. Pour nous offrir une fois encore les anciennes chansons en version acoustique, celles de L’Hôtel des fous, il s’installe dans la niche que constitue à droite la cavité d’une ancienne cheminée. Nous ne sommes pas encore lassés de ces chansons-là, de cet univers fantasmagorique, pas si éloigné que l’on pourrait l’imaginer du monde qui nous entoure et de nos « petits bouts de vie » où il nous faut bien, coûte que coûte, nous jeter. On y avance masqué mais en « costume soigné », on déraille souvent mais « on s‘accroche aux branches », alors on essaie d’aimer, mais, hélas, on fait fausse route, et c’est dans le voyage, loin, vers l’Est que l’on s’échappe pour « un aller sans retour ». En point d’orgue de ces chansons-là que l’on fredonne tant elles nous sont devenues familières, Simon lance son appel à l’ivresse collective et fêtarde, comme à chacun de ses concerts.
Dans un deuxième temps, le duo rejoignant la scène cette fois, s’en va défricher les nouvelles chansons, celles qui trouveront bientôt leurs arrangements. Pour l’heure elles sont encore à l’état d’ébauche et c’est à plusieurs reprises au piano que Chouf nous les présente, délaissant momentanément son emblématique guitare électrique rouge. Simon Barbe l’accompagne encore dans cette prise de risques et qu’il se rassure, on aime vraiment beaucoup son jeu à l’accordéon dont il use avec sensibilité, tantôt par touches imperceptibles, légères, tantôt plus percutant ou plus fluide.
On se sent privilégiés d’assister à la naissance d’un futur album. On entend d’abord l’émouvante confidence de la grand-mère qui a la mémoire qui flanche, qui ne sait plus très bien… Puis la menace qui rôde autour de nous : « ça va, ça va… péter ! » On ne peut être plus clair ! Et comme en écho aux scènes d’horreur au large des côtes italiennes, « le cimetière des oiseaux ». Dans le sillage des anciennes, une « sweet baby doll », qui pourrait bien remettre en question notre goût candide pour les poupées ou ce jeu troublant de miroirs auquel ont collaboré Christian Olivier (texte) et Dimoné (musique). On retiendra enfin une douce ballade où l’amour offre un repli salvateur : « Demain, je tracerai ma route /Dans des déserts de sable /Dans l’infinie poussière /Je m’abandonnerai à toi ».
Ces quelques chansons – on en a compté six – sont prometteuses. Ce quatrième album sera-t-il celui de la maturité ?
C’est donc ça la vie d’artiste. Les chansons sont comme un livre ouvert sur l’histoire d’un homme, d’un artiste – le même, un autre ? vaste débat ! – aux prises avec lui-même et avec ce qui l’entoure.