Stef ! – En pleines formes (© Ludovic Weyland)
20 novembre 2016 – Deuxième album de Stef ! En pleines formes
avec Stef ! Stéphanie Bourguignon aux paroles et au chant – les musiques de François Debaecker et François Locarni – la participation de Manu Galure, Nicolas Bacchus – la collaboration artistique d’Éric Toulis –
le piano de François Debaecker – la guitare, le banjo, l’orgue électronique & rythme disco d’Éric Toulis –
le saxophone et soubassophone de Didier Quéron – le violon de Sylvain Rabourdin…
Si vous n’avez pas encore croisé la Stef ! alors vous ne savez rien ou pas grand-chose de ce que sont les belles – franchement belles – rondeurs féminines, « plus size » dit-on dans l’univers de la mode. Celles qui vous donnent un avant-goût d’autres mots qui sonnent pareillement : chaleur, douceur… bonheur de vivre naturellement ! « Un Maillol d’après nature » dit joliment la première chanson de l’album. Elle aime la vie Stef ! et ça se voit. Sa silhouette, recto verso, que la pochette de l’album dévoile dans un superbe body noir mais aussi son sourire que nous avons toujours vu habillé d’un rouge carmin années 50, sa chevelure méditerranéenne. Quand elle se met à chanter de sa voix magnifique elle vous convainc du bonheur d’être vivant. Alors écouter son nouvel album c’est aussi garder en soi cette énergie-là qu’elle diffuse autour d’elle.
D’ailleurs, plusieurs chansons de cet album sont faites aussi pour danser, comme on le précisait toujours autrefois sur les partitions des chanteurs de rue : samba, mambo, reggae, valse, charleston, disco… On se dit que Stef ! appartient à l’univers du cabaret où s’allient bonne table et bon vin, où la chanson ne se prend jamais trop au sérieux, où l’humour et la satire sauvent de la désespérance.
Côté humour, nous sommes servis dans cet album qui s’ouvre sur une audace, une Ode à mon cul, « une ballade sur mon fessier », une cinglante réponse à tous ces fous de la maigreur qui torture nos corps féminins. Bienfaisante chanson ! De l’humour il en faut aussi pour tordre le cou aux sempiternelles lamentations amoureuses. Franchement, inviter sa belle-mère, un soir de rupture, c’en est une belle idée ! « Surprise, surprise ! J’me doute que tu t’y attendais pas ! ». Et que dire de cette insolite et désopilante chanson inspirée par « un site de rencontre armoricain dédié à l’amour entre Celtes » clin d’œil à La pêche aux moules : « À la pêche aux mâles, mâles, mâles /Je ne veux plus aller maman /Les gars de Breizhtic, tic, tic /Ont pris ton pognon Maman ». Avouons que Stef ! possède un réel talent pour aborder le thème rebattu de l’amour sous des angles bien singuliers. Elle aborde d’autres questions très féminines avec cette même dérision, la corvée du ménage, sur fond de saxo et castagnettes, ou Les bonnes copines avec un refrain emprunté une fois encore à une comptine (un goût pour la goguette, la Stef !) : « Ah les bonnes coco les bonnes coco /Ah les bonnes copines, elles nous dédé /Elles nous dépriment ». La dérision, la satire, une arme aussi contre les injustices comme dans la chanson Bonus Tout se perd… même la misère ! – que l’on imagine interprétée par Stef ! dans Virage à droite, par son personnage de « Stéphanie de Morano ».
C’est avec son complice (dans Virage à droite aussi) son « ami du fond du cœur », Nicolas Bacchus, qu’elle entonne un duo propre à faire sortir à nouveau dans la rue la manif contre le mariage pour tous. J’aime les hommes une réplique à J’aime les filles de Jacques Dutronc. Mais gageons que « la manifestation pour tous » pourrait aussi se former pour Petite messe signée Manu Galure… Un subtil brûlot lancé contre la dévotion pour Jésus… et les flans à l’ancienne des sœurs cisterciennes de l’abbaye de la Coudre. C’est ce monde qui jure sur les Évangiles, avec ses enfants modèles qui est aussi visé dans Boules de Noël, ce lamento du Père Noël qui se sent seul et voudrait qu’on lui écrive toute l’année. Enfin que dirait ce monde réfractaire aux avancées libératrices de Dodo l’enfant Do, douloureux récit d’une jeune femme de vingt ans confrontée à l’avortement ? Le récit commence aux toilettes : « Elle est seule sur la route /Et pétrifiée de peur /Elle attend en tremblant le terrible verdict… », et s‘achève dans la rue « Elle a pris ses vêtements /Elle a même remercié /Mais une fois dehors /Elle avait la nausée ». On pense alors à la chanson d’Anne Sylvestre, à celle de Buridane.
Quant à Seul, chanson accompagnée seulement au piano, ou La dernière fois, où s’insinue le violon de Sylvain Rabourdin, elles nous invitent à ne pas enfermer Stef ! dans son rôle de fantaisiste. Nous osons l’en arracher pour offrir notre coup de cœur à la tendresse de ces vers : « Si je deviens petite vieille à la mémoire /Qui flanche au moindre petit coup de trafalgar /J’aimerais que me surprenne parfois /Le souvenir de ma dernière joie /Avec toi qui m’as montré /Qu’on peut être et avoir aimé »…
j’ai une inspiration commune avec cette chanteuse : l’Ode au beau cul féminin… Merci de cette découverte.
Bien entendu, cher Eric, c’est une bien jolie « Pomme »… Une vraie ! Suis très heureuse que cette chronique ait offert ce lien entre vous deux… Claude Juliette