Le Grand Maul, 1ère édition, St-Paul-lès-Dax 2021 (©Claudine Cop)
20 juin 2021, 1ère édition du Grand Maul J 4
Rugby, littérature et autres rebonds artistiques
Avec,
Jean-Claude Barens (direction artistique)
J4
Cœurs en mêlée avec Léa Pelletant et Gérard Linsolas (Cie du Bélier)
Rugby au chœur, Chœur d’hommes Argileak
Espace Felix Arnaudin et Eglise, St-Paul-lès-Dax (Landes)
Quatrième et dernier jour du Grand Maul, 1ère édition.
Quand, en début d’après-midi, nous rencontrons Jean-Claude Barens, instigateur de cet évènement, l’heure est déjà au bilan et aux perspectives Il n’est pas homme à se nourrir d’illusions. Il regarde les faits, les analyse posément à l’aune de ses décennies vouées à l’organisation de rendez-vous culturels. C’est une affaire qu’il maîtrise pour peu qu’il trouve les bons partenaires. On peut lui faire confiance sur ce point : il sait s’entourer. L’équipe, ça le connaît. A cette heure, il est confiant, malgré la modeste fréquentation qui pourrait quelque peu inquiéter la municipalité, par ailleurs très présente chaque jour à ses côtés. Il sait qu’un public ne se conquiert pas d’un claquement de doigts, qu’il faut penser longtemps à l’avance son plan de communication. Et c’est bien ce qu’il compte initier l’an prochain. On comprend vite qu’il se projette déjà dans une seconde édition, réfléchissant à un meilleur calendrier. Il croit fermement en son projet. Il en connaît l’originalité et la pertinence, se sait soutenu, accompagné par la municipalité.
Avouons, cette année 2021 était si singulière. Du fait des mesures sanitaires, l’évènement était privé de sa dimension conviviale. Jean-Claude en connaît l’importance sur un évènement de plusieurs jours. Du fait des élections, la salle qui accueillait rencontres, projections et expositions a dû être libérée dès hier soir pour devenir bureau de vote.
Voici donc les deux derniers rendez-vous. L’affiche de théâtre du spectacle de l’après-midi qui associe un ballon de rugby, des poteaux, à une paire d’escarpins rouges, titrée Cœurs en mêlée, annonce la couleur : « L’amour c’est comme le rugby, ça commence avec une touche et ça finit par un placage ». Le ton est donné.
Une histoire d’amour dont voici le pitch : « Suite à un accident de voiture, lui, ex-rugbyman au verbe haut et chantant a besoin d’une aide à domicile et elle, ex-prof d’art plastique coincée, en rupture avec l’Education Nationale, est à la recherche d’un emploi. Choc de culture, choc de deux mondes que tout oppose. »
Le décor présente un intérieur bourgeois, un gros canapé et une série d’objets qui soulignent le passé de rugbyman de son propriétaire. Le début de chaque acte est ponctué par l’entrée de l’auxiliaire de vie (Léa Pelletant) et les réactions vives de l’ex-rugbyman (Gérard Linsolas). On comprend dès le début que leur joute oratoire, sans concession de part et d’autre, a toutes les chances de finir par un baiser. Le texte ne manque pas de souligner deux forts tempéraments, un brin outranciers, qui s’accrochent dur comme fer à leur univers et s’y enferment… On voit se provoquer en duel deux mondes censés être inconciliables : celui de l’Art et celui du rugby.
Avouons-le, nous avons ri, et n’avons pas boudé notre plaisir à songer que précisément Le Grand Maul démontrait le contraire, tout comme le dénouement de la pièce d’ailleurs.
Enfin, pour clore ces quatre jours et parce que, nous le savons bien, tout finit en chansons, c’est avec un chœur basque que nous sommes réunis dans l’église St Paul, bel édifice roman, sur le chemin de St Jacques de Compostelle.
Le chœur d’hommes, créé en 1982 au sein du comité d’entreprise EDF-GDF de Bayonne porte le nom de Faiseurs de lumière, Argileak. Ce soir il y a de la gaité et de la fierté dans l’air. On nous apprend que le chœur vit ce soir une triple « première » : d’abord pour une première fois dirigé par leur jeune cheffe, Isabelle Aincart, qui fut nommée juste avant le confinement. On imagine aisément dans quelles conditions elle a pu faire répéter les quatre pupitres… Pour une première fois ensuite, accompagné par un accordéoniste, et, enfin, pour une première fois, associé à un groupe de musiciens traditionnels, des « txistularis » ( « tchishtou », flûte à bec à trois trous).
Le public a volontiers répondu à la gaîté, à la lumière ( !) répandue, en frappant dans les mains. Aux chants de marins, berceuses, chansons d’amour ou d’aventure, inspiration habituelle des chants basques étaient ajoutées quelques chansons mexicaines.
Arrêtons-nous sur la dernière chanson dont la portée mérite d’être rappelée : il s’agit de Txoria Txori (ou plus communément appelé Hegoak, les ailes). Un soir de 1968, à Saint-Sébastien, alors que le régime franquiste interdit la langue basque, Joxean Artze écrit sur une serviette de restaurant ce poème que Mikel Laboa a mis ensuite en musique. Cette chanson, reprise notamment par Joan Baez, est devenue le symbole de toute une culture, de tout un peuple.
Beau point d’orgue pour ce Grand Maul… un soir d’élections !
Hegoak ebaki banizkio
Neuria izango zen
Ez zuen aldegingo.
Bainan honela
Ez zen gehiago txoria izango.
Eta nik,
Txoria nuen maite.
Si je lui avais coupé les ailes
Il aurait été à moi
Il ne serait pas parti
Oui mais voilà,
Il n’aurait plus été un oiseau
Et moi,
C’était l’oiseau que j’aimais