LamaO Editions,  La part humaine 2021 (©Sarane Mathis)

LamaO Edi­tions, La part humaine 2021 (© Sarane Mathis)

10 mai 2021 – Le pro­jet Miramar

Album de Daguerre et livre La part humaine, dis­po­nibles en librai­rie depuis le 30 avril 2021

Avec

Album : Une voix, une gui­tare, une basse avec Oli­vier Daguerre (gui­tare, voix) et Michel Mous­sel

Livre publié chez LamO Edi­tions : 3 artistes, 3 regards, 3 manières de racon­ter avec Louise Quillet (autrice, scé­na­riste) et Sarane Mathis (artiste peintre, dessinateur)


Ils sont trois, trois unis par une même aspi­ra­tion à la créa­tion, à l’imaginaire. Il serait plus juste de dire quatre, car l’éditrice, Fany Sou­ville, sa petite mai­son LamaOé­di­tions, sont au ser­vice du chan­teur amou­reux du livre. Excu­sez du peu : à ses côtés, on trouve aus­si Jéré­mie Kis­ling, Dimo­né, Eddy la Gooyatsh, Michel Fran­çoise, Le Lar­ron, Guillo, Sté­phane Cor­bin, Jéré­mie Bossone…

Oli­vier Daguerre n’en est pas à sa pre­mière expé­rience : deux livres disques ont pré­cé­dé celui-ci. Le groupe, l’équipe, le par­tage sont autant de mots qu’il décline chaque fois que pos­sible autour de ses chan­sons, point de départ de l’aventure. S’il en est que ces temps dif­fi­ciles ont conduits au repli sur eux-mêmes, ce n’est pas lui. Et c’est face à l’Océan qu’il a trou­vé le souffle, l’inspiration de ce nou­vel opus. Des chan­sons pop-rock qu’il a vou­lu « sans filet ni retouche », offertes sans fard, sur le fil de sa voix rocailleuse, long­temps bal­lo­tée, heur­tée aux rochers du littoral.

Etran­ge­ment, alors que l’on nous contraint à gar­der nos dis­tances, à nous méfier de tout contact, alors que la règle est de mettre nos peaux bien à l’abri des autres peaux, Daguerre, lui, met en exergue le corps, les sen­sa­tions, la sen­sua­li­té dans son accep­tion la plus large. Le pre­mier texte est titré Ma peau… « Elle est vivante quand tu l’embrasses »… Peau –aime… Poème… Plus que jamais invi­ta­tion au désir, « là où on perd pied » enchaîne-t-il, et c’est l’image de « l’amazone sur un che­val fou » qui pro­longe cet appel, « défier la mort, des fris­sons plein le corps »… Appel à la résis­tance, à la lutte pour se sen­tir vivant, appré­hen­der le monde autour du nous, « les enfants… des forêts, des oiseaux, des fleurs »… Et quoi de mieux que l’« Océan majes­tueux » et son éter­ni­té pour nous rap­pe­ler au bleu du ciel, à l’amour infi­ni « à pleu­rer /​à offrir /​à revendre… », à la vie enfin ? Sans doute serez-vous nom­breux à vous rêver, tout comme lui, dan­sant le tan­go, chan­tant à l’envi ces vers du der­nier poème, rimant tout entier en « O »…Tan­go, oiseaux, bateaux, mots et peaux bien sûr… Et pour illus­trer la cou­ver­ture, les textes, le jeune des­si­na­teur Sarane Mathis a posé, comme sur les deux pré­cé­dents livres-disques, son trait sin­gu­lier, sa plume et ses cou­leurs. Autre lan­gage que celui de l’art pictural…

Invi­tée à écrire ce que lui ins­pirent les textes de Daguerre, Louise Quillet, scé­na­riste et autrice de nom­breux docu­men­taires, signe là une nou­velle, La part humaine, à rebours… A rebours de la sen­sua­li­té des chan­sons de Daguerre ? Sans trop en dévoi­ler, c’est en effet une dys­to­pie où tous les ingré­dients de ce qui nous est infli­gé depuis un an, de tout ce qui nous menace, se trouvent ampli­fiés, por­tés à leur paroxysme : une socié­té tota­le­ment contrô­lée par le numé­rique, le Grand Algo­rithme. Telle est sa loi : « Déci­der par soi-même rend fou, car on ne peut jamais être sûr. L’humain doute tel­le­ment qu’il finit par mou­rir de tris­tesse et de déses­poir. La puce vous sauve de ces dan­ge­reux troubles men­taux. » Une socié­té tota­le­ment contrô­lée ? Pas sûr… Regar­dons le lavis bleu et mauve de la qua­trième de cou­ver­ture. Il est sans aucun doute le signe d’une espé­rance… Avec lui, qui sait, « le son bleu des oiseaux, le bruis­se­ment blanc du vent dans les feuilles, les cha­touilles des herbes qui caressent [les] che­villes » ? Regar­dons le des­sin final qui s’étale sur une double page : un homme est au large, debout sur son embar­ca­tion ; la mer est calme, au loin la terre… Et la voix de Daguerre chante :

« Je pro­jette là-bas la caresse de l’eau

Un ruis­seau de dési­rs des cas­cades de peaux »…