Prix Nougaro – Le Bijou – Samir Flynn – Avril 2022 (©Claude Fèvre)
27 avril 2022 – Auditions du Prix Nougaro, catégorie « Chanson en tous genres », organisées par la Région Occitanie et Passerelle Productions, avec l’accueil du Bijou.
Ta chanson colle à la peau
Avec, par ordre de passage :
Paul Coello /MOKAZZ – Lilia Aroztegui /LILIA – Samir FLYNN – Justine Lajat /ÖJA – Ivan Voena /TIKKA – Tifaine Guardiola /TIPHENE – Tom Hanrion /JAW DROSKI - Lyana Pouilly /LYANA DIESE
Le Bijou (Toulouse)
Soulignons immédiatement que nous avons vu suffisamment de jeunes découvertes poursuivre leur chemin professionnel, confirmant ainsi nos premières impressions, pour croire en la pertinence de ce Prix Nougaro, anciennement Prix d’écriture Claude Nougaro. Nous citerons un seul exemple, très personnel, celui de Claire Gimatt qui, en 2011, du haut de ses 17 ans avait remporté le prix dans sa catégorie et que nous invitions à participer à ce qui était alors notre scène découverte en Ariège pour l’accompagner de notre soutien, ensuite, tout au long de sa création. Nos chroniques en attestent. Aujourd’hui le lauréat 2016, Lombre /Andréas Touzé siège dans le jury aux côtés de quelques membres imminents de la profession, comme Alain Navarro (Pause Guitare, Week-end avec Elles) ou Corinne Labat (Pic d’Or) et du parrain de cette édition, le tarbais Sylvain Duthu de Boulevard des Airs. Doit-on encore citer le duo Bigflo & Oli, lauréat en 2009 ou bien Matéo Langlois qui poursuit son ascension depuis son prix en 2016 ?
Cette année, les prix dont le contenu implique « accompagnement artistique, Master class, Coaching, développement du projet professionnel » se resserrent autour de cinq grandes catégories largement ouvertes aux nouvelles formes d’expression et déclinées en sous catégories recevant chacune un prix : Plume d’ange (poésie, nouvelle, médias, c’est –à‑dire newsletters, blogs, site web), cinéma (scénario de court métrage, clip vidéo, vidéo courte) Schplaouch /Arts visuels (BD en solo ou binôme, photographie, création visuelle comme dessin, peinture, art digital, graffiti, illustration) Sing Sing Song (Chansons en tout genre, musiques instrumentales, podcasts) et enfin une catégorie spéciale nommée Ô moun païs (ode à sa région, ville, village, quartier selon l’expression artistique de son choix).
Aujourd’hui donc nous assistons aux auditions de « Sing, sing song, chansons en tous genres ». Huit ont été sélectionnés, dans une parfaite parité, sur cinquante dossiers, ce qui est fort peu si l’on considère l’étendue géographique de l’Occitanie et l’amplitude des âges. De toute évidence ce prix a besoin de mieux se faire connaître. On plaisanterait volontiers sur l’idée que ces jeunes que nous découvrons, sont passés, en une journée seulement, de leur salle de bain à la scène convoitée du Bijou… Détrompez-vous, c’est loin d’être une réalité, comme l’attestent certains parcours. Notons par exemple, que Lilia « décide de vivre de sa musique » suite à son passage sur M6 dans Audition Secrète, aux côtés de Pascal Nègre, que Samir Flynn, le lauréat, a déjà quatre EP disponibles sur les plateformes d’écoute et prépare un premier album, que la présentation de la fiche de Tiphène a déjà toutes les qualités professionnelles requises, que Jaw Droski se dit repéré par Pomme pour la singularité de sa voix… Ils ont donc, pour la majorité, déjà une histoire… Mais nous noterons plus encore la solide formation musicale de certains à commencer par la benjamine, Lyana Dièse, dont la fraîcheur et l’authenticité ont été un instant de grâce dans cet après-midi. Le jury a pu aussi souligner la voix assurée, profonde de Öja, son excellente diction (enfin, nous comprenions les textes, après le débit mal assuré de certains) étudiante en Musique Actuelle au conservatoire, ou bien les arrangements du trio jazz qui entoure Paul Coello de Mokazz. C’est l’occasion de s’interroger sur les bandes enregistrées des rappeurs et rappeuses dont on ne sait rien… Peut-on apprécier semblablement leurs prestations ?
Ce qui a fait le succès de Samir Flynn c’est, sans contestation possible, sa présence scénique résolument tournée vers le public, la qualité de sa diction, mais peut-être plus encore ses textes, capables de passer d’une expression autocentrée, de la douleur de l’absence au regret « j’aurais aimé guérir ce monde mais j’peux pas, /j’ai soigné mes rimes /J’connais la dérive j’connais la déprime » avant de nous évoquer les combats pour les démunis vite balayés par une décision administrative…
Certains s’affichent déjà – courage ou prétention ?- comme auteurs- compositeurs- interprètes – on voudra bien admettre que l’on parle aussi des auteurEs ! – mais de toute évidence que l’on parle, rappe, chante, il s’agit bien de « mettre en scène » la parole, donc d’écrire un texte qui puisse être lu, entendu, compris… Nous éviterons d’aller plus loin sur ce point mais nous vous avouerons que, parfois, nous aurions eu besoin d’un traducteur.
Notre coup de cœur ira à Tiphène, jeune femme de 23 ans, accompagnée par deux musiciens, l’un maîtrisant les sons enregistrés, et jouant de la batterie électronique et l’autre à la basse. Le trio nous a carrément emportés dans sa première chanson où Tiphaine Guardiola a été capable, en français comme en espagnol, d’exprimer son cri « Que jamais je ne cesse d’aimer » dans un total abandon à la scène, telle une Catherine Ringer. Remarquable prestation à froid suivie d’une chanson plus posée mais qui pourrait de toute évidence expliquer l’explosion qui a précédé : « Laissez, laissez, laissez-moi /Je suis trop sensible… »
Promis, nous suivrons Samir Flynn qui remporte le prix mais aussi Tiphène qui sera très bientôt candidate au Pic d’Or…