Ronan la poésie pour tout bagage (© Claude Fèvre)

Ronan la poé­sie pour tout bagage (© Claude Fèvre)

du 19 au 23 avril 2016 – Apéro concert

Ronan accom­pa­gné au pia­no par Gas­par Chefdeville

Grand Rond (Toulouse)

L’homme n’a plus vingt ans depuis sans doute un bout de temps. Son visage où se lit « l’usure de la vie au coin des yeux », sa barbe poivre et sel, sa sil­houette mas­sive. Tout en lui des­sine le por­trait d’un homme au long cours. Et c’est avec ses tra­ver­sées dont il garde enfouis les pay­sages qu’il vient ici chanter.

Der­rière son micro par­fois il écarte lar­ge­ment les bras comme pour mieux s’offrir au vent qui le pousse vers nous. Son sou­rire est à lui seul une invi­ta­tion au par­tage et ses regards vont avec ten­dresse à Gas­par Chef­de­ville son pia­niste, plus sûre­ment encore son com­pa­gnon de traversée.

Tout est sobre ici, sans emphase dans l’apparence et le geste, ni dans le pro­pos entre les chan­sons. Il pré­fère quelques petits textes tendres ou mali­cieux. Le texte, oui le texte…

C’est une matière vivante, bruis­sant de toutes les émo­tions, de toutes les sen­sa­tions. C’est avec elle qu’il façonne ses vers, ses rimes, ses images qui s’entrechoquent et s’habillent de rêves.

Les mots de Ronan ont quelque chose de son pas­sé, un pas­sé de poé­sies lues, déglu­ties qui jaillissent au bout de sa plume. C’est l’apparition sou­daine d’un monde où la nature s’en vient offrir élé­gam­ment ses décors de pluie, de nuit, de vents, de mers et de mys­tères. C’est un homme confron­té à ses doutes et ses regrets, à ses attentes et ses errances. La voix pro­fonde et grave exerce sur nous comme un magné­tisme auquel on ne résiste pas. On l’écoute, on la suit dans les méandres lyriques du texte. On s’étonne de ne pas avoir enten­du s’agiter les enfants pré­sents dans la salle…

Quand Ronan évoque des aspects réa­listes de la vie, ce n’est jamais sans la dis­tance poé­tique : la chute des feuilles comme celle des vies, la ronde des enfants et la ronde des temps, une vie de femme, entre mar­mots et usine, se tour­nant enfin vers le soleil, les sou­ve­nirs qui vous font de drôles de matins cha­grins, et même le joli cul d’une ren­contre man­quée… Aucun risque avec lui de déra­page vul­gaire… C’est tou­jours plein de ten­dresse et de beau­té avec ce pia­no tan­tôt mélan­co­lique, tan­tôt fré­tillant comme un accom­pa­gne­ment impro­vi­sé épou­sant toutes les nuances d’une his­toire de Charlot.

On pense que Ronan est de la même famille, du même sang que d’autres avant lui. Claude Nou­ga­ro par exemple. Comme lui il pour­rait écrire :

« Les mots m’ont pris pour une cara­vane, je devais avoir des airs de désert.
Ah ! Les mots, quels dro­ma­daires, il suf­fit d’un sty­lo, un révol­ver à encre, pour s’enfouir ou se détacher :
Cra­cher sa clarté
Au lieu des ténèbres
Cra­cher du limpide
Du lim­pide !! »
(Texte manus­crit – Expo­si­tion « Et me Voi­ci » Octobre 2006 )

Ronan annonce un finan­ce­ment par­ti­ci­pa­tif pour la sor­tie d’un album avec l’accompagnement de Gas­par Chef­de­ville au pia­no et d’Estelle Besin­grand au vio­lon­celle. On espère qu’il pour­ra être accom­pa­gné d’un livret qui per­mette de savou­rer cette plume déli­cate. http://​ronan​chan​son​.wix​.com/​r​o​nan