Nathalie Miravette, la reprise lui va si bien (© Claude Fèvre)

Natha­lie Mira­vette, la reprise lui va si bien (© Claude Fèvre)

20 avril 2016 – Création de Cucul mais pas que… 2

Natha­lie Mira­vette (pia­no, accor­déon dia­to­nique) et Didier Bégon (gui­tare, basse et autres effets). Mise en scène de Juliette

Le Bijou (Toulouse)

« Que Natha­lie Mira­vette soit un miracle à mirer et à admi­rer sur toutes ses facettes, dès qu’elle monte sur scène… nul n’en dis­con­vien­dra (sauf les mirauds du haut des mira­dors !) Une belle Mira-belle à consom­mer, juteuse et cro­quante, sucrée mais avec ce rien d’acidité qui en relève le goût et donne envie de replon­ger la main dans la coupe de fruits. »

Cathe­rine COUR

Les com­men­ta­teurs riva­lisent d’images pour par­ler de Natha­lie Mira­vette depuis qu’elle s’est affran­chie de son rôle d’accompagnatrice, com­po­si­trice – auprès des plus pres­ti­gieux de la Chan­son, tout de même ! — pour occu­per à son tour le devant de la scène. Comme une enfant espiègle qui aurait échap­pé à la sur­veillance de ses parents !

Ses pre­miers pas dans son propre spec­tacle datent de cinq ans déjà. Rodé au fes­ti­val off d’Avignon en 2011, dans le déli­cieux petit Théâtre des Vents, son Cucul mais pas que… pre­mière ver­sion, avec sa tout aus­si explo­sive accom­pa­gna­trice Jen­ni­fer Quillet, n’a pas ces­sé de lui valoir des éloges. On sou­ligne à l’envi ses talents de pia­niste, de comé­dienne, d’interprète tendre et délu­rée. On l’aime, un point c’est tout !

Alors quand s’annonce un nou­vel épi­sode avec un autre accom­pa­gna­teur pour lui don­ner la réplique, on se pré­ci­pite. On est prêt, on l’avoue, à se lais­ser prendre au jeu quand on regarde le par­cours de Didier Bégon nou­vel­le­ment arri­vé à ses côtés. Les trou­vailles de la voix et de l’instrument, ça le connaît. Quand il n’est pas dans la for­ma­tion de Juliette – ce qui en soi est déjà une aven­ture de taille ! — il s’en va ensei­gner, écrire, arran­ger. Aucun style de musique ne lui échappe, et sur­tout pas les pos­sibles ver­ti­gi­neux du champ de l’informatique.

Escor­té donc par ce musi­cien-là, ce Cucul mais pas que, deuxième ver­sion, est plein de pro­messes. Le duo se met en place, pour deve­nir au fil des chan­sons un échange fan­tai­siste effi­cace dans le chant, comme dans l’accompagnement musi­cal. Un vrai duo en somme.

Natha­lie Mira­vette, avec sa coif­fure sage, sa tunique noire à peine pique­tée de quelques brillants, campe son per­son­nage de femme sans âge, attar­dée dans l’enfance, « cham­pionne du monde d’humilité ». Et l’on rit avec elle d’abord de cette chan­son — por­trait du par­fait imbé­cile dou­blé d’un gou­jat, en réponse à « Cucul mais pas que » qui dézin­guait les com­por­te­ments fémi­nins. Match nul ! Puis s’accompagnant de cas­ta­gnettes, elle enchaîne avec « Y a ceux qui font la chose… » pour res­ter dans le sillage de ces chan­teuses du siècle pas­sé qui, avant elle, avant nous, en avaient eu bien des audaces ! Rejoi­gnant son pia­no sur lequel elle vou­drait nous faire croire qu’elle débute, elle entonne l’inénarrable chan­son de Wal­ly, lettre de rup­ture de la cliente d’Yves Rocher pen­dant que son accom­pa­gna­teur mime les mou­ve­ments du batteur.

C’est ain­si que s’installe un va-et-vient constant entre les chan­sons de notre patri­moine, leurs thèmes indé­mo­dables, et les créa­tions d’aujourd’hui sur nos réa­li­tés très contem­po­raines comme cette mode du « coa­ching », ou cette grand-mère d’un tout nou­veau style, plu­tôt hip-hop, fraî­che­ment libé­rée de pri­son. On rit fran­che­ment comme on rit aus­si de Six Roses, de Doc­teur Miracle où l’on croit réen­tendre la gouaille d’Annie Cor­dy. Bien enten­du, ce réper­toire puise dans les chan­sons qui se rient des échecs, des mal­en­ten­dus amou­reux, des soli­tudes sur­tout : Avec moi ça ne dure jamais (Ber­nard Joyet), Achète un chien (Les Joyeux Urbains), Je hais les gosses (Allain Leprest) La dame pipi (Eric Tou­lis)…

Au pia­no, à l’accordéon dia­to­nique, avec seule­ment l’accompagnement de la basse, de java en chant corse ou slave, ou même en chant lyrique avec ce pré­ten­du manus­crit de Madame But­ter­fly, les reprises offrent au talent de Natha­lie Mira­vette un immense champ d’exploration.

Et même si la fan­tai­siste nous enchante lit­té­ra­le­ment parce qu’elle nous fait tel­le­ment de bien, on reste pro­fon­dé­ment atta­ché à ces quelques moments de ten­dresse où sa voix se fait douce et câline : « J’aimerais par­ta­ger avec toi un fré­mis­se­ment de nos secrets… une chan­son qui nous res­sem­ble­rait ».

À voir les sou­rires affi­chés sur les visages en quit­tant la salle, à sen­tir cette joie inté­rieure qui nous habite, on sait que le nou­veau duo a gagné son pari. On se pro­met même d’y reve­nir dans quelque temps pour voir comment­ ces deux-là vont pou­voir gran­dir ensemble.

Voi­ci la liste des chan­sons inter­pré­tées par Natha­lie Mira­vette ce soir :

La plus modeste (D.Bégon) – Cucul/​Concon (M.Lods/Ph.Biais) – La chose (M.Carré/M.Berthomieu) – La rup­ture (Chraz/​Lilian Der­ruau) – Doc­teur Miracle (R.Bagdasarian) – Dépres­sive (D.Bégon) – Dame pipi (E.Toulis) – Tout et rien (M.Carré/N.Miravette) – Une chan­son qui nous res­sem­ble­rait (R.Lemire/N.Miravette) – Avec moi ça ne dure jamais (B.Joyet) – Mon meilleur amant (F.Morel/N.Miravette) – Grand-mère (D.Bégon) – Je hais les gosses (A.Leprest) – Le miroir du salon (Sim/G.Chatry) – Cucul/​Elle est bien brave (B.Joyet/N.Miravette) – Chopin/​Achète un chien (M.Urbanet/A.Joyet) – Six roses (G.Coulonges/M.Auzepy)