Barjac, Marie Baraton(©Vincent Leclerc)

Bar­jac, Marie Bara­ton (©Vincent Leclerc)

1er août 2016 – Barjac m’en Chante, Marie Baraton

avec Marie Bara­ton, chant, Pierre-André Atha­néMichel Hau­mont, gui­tares

Chapiteau – Barjac (Gard)

Des textes doux amers, amou­reux. Et voi­là un album aux arran­ge­ments déli­cats, aux musi­ciens déli­cats, comme un écrin à la voix vibrante et sin­cère de son inter­prète. Une chan­son qui fuit la mode et le bruit, et une chan­teuse d’exception

Hélène Haze­ra dans Chan­son Boum, France Inter, 5 octobre 2014

Le concert de Fabien Bœuf vient de nous lais­ser quelque peu per­plexe. On s’interroge encore sur les chan­sons de ce jeune artiste qui esquisse sans fin ses pay­sages inté­rieurs, des voyages intimes – si intimes que l’on cherche le moyen de les par­ta­ger – aqua­relles, esquisses où nous avons ten­té en vain de nous immis­cer. La voix est claire, l’accompagnement vio­lon­celle et gui­tare élec­trique aurait pour­tant de quoi rete­nir notre atten­tion. Mais le charme n’a pas opé­ré. Comme un plat aux ingré­dients raf­fi­nés, aux sen­teurs appé­tis­santes que l’on n’aurait pas pu goû­ter… Pas le lieu, pas l’heure ?

Avouons que l’attente est d’autant plus forte quand com­mence le concert de Marie Bara­ton entou­rée – por­tée devrait-on dire- par deux gui­ta­ristes qui lui offrent un maillage sonore sub­tile et effi­cace, sou­vent très jaz­zy… au point que par­fois on aurait aimé les entendre davan­tage encore. Ajou­tons d’emblée que l’un d’eux, Pierre-André Atha­né, est bien plus qu’un musi­cien accom­pa­gna­teur puisqu’il signe la plu­part des textes et des musiques de ses chan­sons. Marie Bara­ton est donc de la famille des inter­prètes. Détail qui à Bar­jac – et très sou­vent ailleurs – revêt son importance.

Elle gagne la sym­pa­thie du public dans les pre­mières secondes. Elle l’apostrophe visage ouvert, sou­riante. Dans sa robe fraîche, coupe années cin­quante, blanche pique­tée de petits motifs, elle a quelque chose d’hier, d’avant-hier… Une fraî­cheur. Un petit air d’innocence. Comme ces pho­to­gra­phies noir et blanc de l’été 1936…C’est ain­si qu’elle nous est appa­rue : « vin­tage »… Le mot est très mode, on l’avouera volon­tiers, mais il lui va si bien. Cette belle voix, haute et claire qui par­fois a les accents d’une chan­teuse de fado, une inter­pré­ta­tion et sur­tout des textes qui nous ramènent obs­ti­né­ment dans le pas­sé, celui d’une chan­son qui fêtait la vie. Elle emboîte même le pas à Charles Tre­net ou Jacques Pré­vert quand elle chante la déam­bu­la­tion de la Tour Eif­fel dans Paris.

Bar­ba­ra écri­vait « en ce temps –là ça guin­chait, ça dégin­gan­daitça cha­lou­pait, ça éna­mou­rait … » Oui, Marie Bara­ton c’est un peu de ce temps-là… Sauf qu’elle n’y « poli­tique » guère… Ce n’est certes pas la « criée du quo­ti­dien », c’est même tout le contraire comme si ses chan­sons devaient nous pro­té­ger des rumeurs de la ville, de la vie. Elle vou­drait tant « avoir un cœur d’or et de miel /​Eloi­gner le doute et le mépris /​Poser sa joue sur l’arc en ciel… ». Et c’est cette image que nous gar­dons d’elle quand elle quitte la scène.

Elle n’ignore rien pour­tant des épreuves, de « cette salo­pe­rie d’comédie » qu’il nous faut vivre, elle sait que les plus belles fleurs finissent par faner. Elle n’ignore pas les dérives, les méprises de l’amour et sur­tout pas les pires, celles qui mènent aux vio­lences (ter­rible chan­son Tu silences). Elle-même a dû faire face à sa sin­gu­la­ri­té qu’elle évoque ten­dre­ment dans Ma petite main. Oui, elle sait que par­fois « Tout part à l’envers /​Ma plume en hiver »… Mais elle semble pro­té­gée de l’amer, de l’amertume. Elle sou­rit à la vie et nous empor­te­rons cette folie douce. Très, très douce… Car contrai­re­ment à ce que dit sa chan­son Ma folie aime nous ne l’avons guère vue dans « les mises à sac, pieds dans la flaque /​Les doigts sur les portes qui claquent »… Et c’est un peu dom­mage. On aurait aimé qu’elle dégrafe son cor­sage, son corps –trop- sage… « Rebelle et langue de vipère » en somme…

« Rou­ler par terre » au risque de salir la petite robe claire…