Jules et le Vilain Orchestra (© David Desreumaux)
22 octobre 2015 – Concert de Jules et le Vilain Orchestra
Avec Jules (guitare, piano, voix), Pascal Lajoye (guitare, chœurs), Mathieu Debordes (orgue, piano, trompette, chœurs)
Le Bijou (Toulouse)
Le Vilain Orchestra, ce soir, c’est un trio. Le lendemain, sur une plus grande scène, c’est un quintet. En formation complète, avec les cuivres, trompette et trombone, comme dans le dernier album « Le sale gosse » ils sont sept. Vous l’aurez compris, c’est modulable le V.O. mais toujours avec la même démesure en scène. Avec cette envie d’en découdre avec la morosité, de lui tordre le cou, la piétiner à grands coups de guitares et de claviers frénétiques. Et c’est franchement efficace, vous pouvez m’en croire.
Le concert s’ouvre avec l’homme de foire, celui qui « sortait de sa cage en pliant ses barreaux ou portait des armoires comme des plumes », l’homme le plus fort du monde. On commence donc avec une éloquente métaphore du spectacle vivant qui vous en met plein les yeux, des étoiles et un peu de larmes aussi !
Jules c’est le beau gosse, le dandy sur les bords, un petit côté Alain Chamfort. Costume chic, chemise blanche et bretelles, mais surtout éternel sourire à faire de la pub pour un dentifrice ou une machine à café… Il en serait presque agaçant tant il est efficace pour vous séduire et vous emporter dans ce qu’il nomme la « variété alternative ».
Il présente ses musiciens, deux gars, « pas les plus avenants », qui font carrément la « tronche » et ne se départiront pas de ce rôle-là jusqu’à la dernière mesure, malgré les incessantes facéties de leur meneur de jeu. Bravo les gars ! Les cha la la la, de La ballade de l’indécis puis le refrain de C’est cher mais c’est bon vous mettent la puce à l’oreille à vous spectateurs qui vous mettez à chanter, gesticuler dans une chorégraphie imposée. Ceux qui s’annoncent comme les « Tintin de la chanson » pourraient bien être en train de vous mener en bateau.
Au tiers du concert en effet le message est clair : sous la « rigolade » se cache une chanson beaucoup moins légère qu’il n’y paraît. Par amour, dont on scande le refrain avec ardeur n’est autre qu’un texte qui vous dévide le pire. L’aveu Tiens ça y est tu m’fais peur s’adresse à une femme dont on devine le doux prénom, mais qui pourrait bien désigner tous ceux qui par le monde entraînent les peuples à leur perte. Citons aussi l’hommage troublant au père Il était mon ami, puis le regard du disparu sur sa pauvre vieille que la mort a dû oublier, et cette efficace dénonciation du machisme ordinaire (Thérèse). C’est le moment de souligner que Jules a son côté chanteur pour dames… Quel délicat portrait que celui de la « chiante » qui n’est autre que la petite frangine, et cette série de rencontres, de l’oculiste végétarienne à l’architecte mélomane en passant par la fleuriste férue de peinture (Mal Barré).
Sous des allures festives, la tendresse et l’émotion affleurent et c’est là tout le charme du Vilain Orchestra comme lorsque, seul au piano, Jules interprète Maintenant que je suis seul ou lorsqu’il nous laisse sur l’évocation de la rencontre furtive de deux inconnus : J’ai l’impression de vous connaître /Comme si nous nous étions vus tout nus /La pudeur a chanté à tue-tête puis s’est tue.
La chanson d’un sale gosse comme on les aime. On rit, on chante, on danse – enfin on aimerait beaucoup ! – on essuie une larme. Le spectacle quoi !