28 janvier 2015 – 14e Détours de Chant
Manu Galure en quartet
Le Bikini (Toulouse)
On ne voudrait surtout pas vous faire attendre ! On sait votre impatience à lire dans votre quotidien ce que nous avons vécu hier soir au deuxième jour du festival toulousain de la Chanson. Du moins, c’est tellement plaisant d’y croire !
Manu Galure qui sort un nouvel album, qui en appelle aux sons les plus déglingués comme toujours, qui affronte le public debout, lui qui nous avait ravis, emportés dans sa danse du diable au Bijou. Souvenez-vous, il l’avait au préalable mis cul par-dessus-tête…enfin presque !
Tous les fidèles toulousains sont là, certes, mais aussi une partie du public de Barcella. Alors évidemment, le public « chanson » perd un peu ses marques et du coup il rajeunit. D’un seul coup, d’un seul ! Tiens, bizarre, on se sent des fourmis dans les pieds. On est prêt à entrer dans la danse, danse du diable, s’entend, comme vous pouvez le deviner déjà dans la chronique de son album.
Alors n’en déplaise à ceux qui garderont toujours la nostalgie de l’homme à la contrebasse du temps de son duo des P’tits t’Hommes, ou de l’homme au piano auquel il fait subir les plus improbables transformations ! Avouons, nous l’aimons tant ce Manu-là !
Mais avec ses trois « galuriens » ainsi qu’il les nomme (le « platiniste » Bastien, aux sound systems, tout comme Guillaume à la basse, Hugo à la batterie, aux tôles aussi… !) ce Manu-là a de quoi remporter la mise.
Oui, que la Chanson aille à la conquête du public debout, à la conquête des « musiques actuelles » avec cette énergie-là, cette qualité de textes et de sons là, pourquoi ne pas y croire ? Qu’elle sorte ainsi de son ghetto générationnel, qu’elle s’en aille flirter avec la techno, l’électro, qu’elle brouille les pistes, en gardant la main mise sur des textes qui bousculent, qui transportent l’imaginaire des poètes d’aujourd’hui.
Ce Manu ébouriffé, autant dans sa chevelure que sous son crâne, là, pieds nus, vêtu de son jean à bretelles sur son tee-shirt dépenaillé, ce Manu qui voudrait nous faire peur avec ses « chansons d’horreur », où les contes pour enfants tournent mal, parce que « le monde est un épouvantail et que nos jours sont comptés », n’arrête pas de tendrement nous émouvoir comme dans cette nouvelle chanson, « Ne me lâche pas la main /J’ai peur de disparaître un jour de pluie /De fondre un matin /Comme un biscuit » qui fait curieusement écho à Ramène moi à ma maison (la plus belle de l’album ?) sur laquelle s’achève ce concert. Une première !
Nous y étions et nous sommes déjà curieux de voir où vont s’en aller les galuriens, leurs sons, leurs lumières en faisceaux, leurs mots dont nous n’avons perdu aucune miette ce soir (il faut souligner la superbe acoustique du lieu et le travail des sonorisateurs !)…
BARCELLA : LA JOIE POUR TOUT BAGAGE
Il est toujours là ce Mathieu, ce Babar qui fait swinguer les rimes, ce Bab’z, dont nous vous parlons souvent, avec ses 33 ans et son mètre 87. Toujours là avec ses quatre musiciens qu’il a l’élégance de présenter à peine entré en scène (claviers, contrebasse, basse, trompette, batterie, guitare, trompette, machines…) avec la même envie du partage et la joie d’en découdre avec la scène. Oui, la joie ! En une dizaine d’années il s’est acquis le privilège d’entendre le public reprendre en chœur ses chansons, venir pour d’emblée sauter, frapper des mains avec lui. À la troisième chanson, il est déjà au milieu de nous, avec sa générosité. On se dit qu’il faudrait être aveugle et sourd pour résister… ! Alors ne boudons pas notre plaisir, notre joie commune. Frappons dans les mains, sautons, dansons pour dire non à la tragédie du monde ! Laissons-nous emporter aussi quand il nous emmène du côté de la nostalgie de L’âge d’or, du côté du chagrin de la mémoire qui s’fout le camp chez nos vieux, du côté de notre désespérance partagée, celle des jours où l’on n’en a plus la force… Mais c’est si bon de revenir ensuite au slam, au rap joyeux dont on perd souvent les mots, mais qui donnent une furieuse envie de vivre !