Enzo-Enzo–Eau-Calme– 2021 (©Samuel Rozenbaum)

Enzo-EnzoEau-Calme– 2021 (©Samuel Rozenbaum)

30 juin 2021, En écho au nou­vel l’album de Enzo-Enzo, sor­ti en mars 2021

« Un sari vert, cou­leur Eau-Calme » 

Avec

Enzo-Enzo (chant) Eliott Wein­gand (gui­tare) Lulu Zer­rad (gui­tare, per­cus­sions)- Invi­tés : Sta­cey Kent, Laurent Viel et le gui­ta­riste Thier­ry Gar­cia.


Aver­tis­se­ment : Ce texte ne sau­rait pas­ser pour une chro­nique. C’est une pure fic­tion, un jeu d’écriture où se trouvent insé­rés en carac­tères gras les 14 titres de l’album et quelques mots, expres­sions, emprun­tés ici ou là aux chansons.

1.Des jours avec, des jours sans 2. Ciel noir, ciel bleu 3. Notre amour 4. La nuit s’éteint 5. Je lis dans ton som­meil 6. Je n’ai pas rêvé 7. Juste quelqu’un de bien 8. Balai de crin 9. Arif ven­deurs de roses 10. Les yeux ouverts 11.Edith 12. Le ban­quet des abysses 13. Légère 14. Accostez-moi

Un sari vert, cou­leur Eau-Calme

A l’heure du tout pre­mier souffle, à l’instant du pre­mier cri, devant l’incroyable bouf­fée d’amour qui lui vient d’un coup, d’un seul jusqu’à la pointe du cœur, l’homme prend le petit corps qu’on lui tend contre sa peau et pro­nonce seule­ment : « Elle s’appellera Śān­ta jala, Eau-Calme ».

C’est une évi­dence, il lui veut toute la beau­té du monde, l’azur et la soie sans fin. Bien sûr, il sait tout des épreuves qui l’attendent, des jours avec, des jours sans, des jours de misère et de faim, ciel noir, ciel bleu, il sait… Il prend la main d’Aru­ni, la serre très fort, à lui en bri­ser les os. Elle sou­rit, échappe alors un ins­tant à la dou­leur qui déchire encore son ventre et garde les yeux ouverts sur ce tableau : Arif ser­rant contre son jeune buste nu leur fille, fraî­che­ment née. Notre amour sau­ra la pro­té­ger, l’arracher à notre sort. Elle pense aux âmes dis­pa­rues, au cor­tège de femmes qui, avant elle, ont vu ain­si, entre leurs cuisses ouvertes, jaillir la vie… Elle les ima­gine réunies au ban­quet des abysses, au caba­ret de la mer trin­quant à la nais­sance de Śān­ta jala. A voix haute, elle remer­cie les dieux de se sen­tir sou­dain légère :

« La nuit s’éteint /​Les ténèbres s’en vont /​Je n’ai pas rêvé /​Je lis dans ton som­meil /​J’ai vu la force d’aimer /​Dans tes yeux »

Ces vers res­te­ront gra­vés dans la mémoire d’Arif, ven­deur de roses, ven­deur d’amour qui pique. Comme un man­tra il les répète chaque soir, chaque fois qu’il va dans les bras­se­ries les plus sélects de Paris, après les heures de balai de crin sur les trot­toirs où pas une âme ne s’arrête, ne voit seule­ment qu’il est juste quelqu’un de bien … Il s’entend par­fois dire en ben­ga­li « Accos­tez-moi ! N’ayez pas peur, je ne mords pas. » Il vou­drait pou­voir dire à Jacques, à Bar­ba­ra, à Théo, Edith, ou Jean, à Léo, à Serge : Cent roses, le loyer du tau­dis, cent roses, une école pour Śān­ta jala… Mille roses, un sari pour Aru­ni. Il vou­drait tant des rou­pies pour un sari. Un sari pour Aru­ni.

Un sari vert, cou­leur « Eau-Calme »…